Un prix Nobel veut réduire le temps de l’indemnisation chômage
Publié le 12 novembre 2010 par Les Influences
Christopher Pissarides recommande de réduire à un an le chômage afin de mieux lutter contre le chômage de longue durée. Qui connaît vraiment sa théorie couronnée cette année par le Nobel d’économie ?
« L’indemnisation chômage doit être limitée à un an au maximum pour combattre le chômage de longue durée« , a déclaré à l’AFP lors d’une conférence à Stockholm, mardi 9 novembre Christopher Pissarides. L’Etat doit subventionner de vrais emplois. Ce professeur à la London School of Economics et colauréat du Nobel d’Economie 2010 étaie : « L’expérience professionnelle est une très bonne chose pour les chômeurs. Mais cette expérience devra être un vrai emploi productif, pas un emploi inventé simplement pour forcer les gens à sortir de chez eux« . Christopher Pissarides prolonge la théorie qu’il a élaborée avec deux économistes américains, Peter Diamond et Dale Mortensen. Fondations de leur théorie : Sur le marché de l’emploi, le prix n’est pas la seule variable d’ajustement. La durée d’indemnisation du chômage ou les coûts des licenciements jouent aussi un rôle clé.
Le prix de la Banque de Suède, autrement dit le Nobel d’économie 2010, a été décerné à ce trio de choc, et a été plutôt discrètement célébré dans les médias français. La mort survenue la veille du Nobel d’économie français, Maurice Allais, a sans doute gommé en partie l’importance théorique des lauréats d’origine américaine et britannico-chypriote. Qui connaît réellement leur hypothèse ?
On connaissait les emplois cachés, ceux qui ne trouvent pas preneur faute d’une bonne publicité les concernant pour expliquer la situation où la demande exprimée par les employeurs ne parvient pas à rencontrer l’offre de leur force de travail par les candidats salariés. Mais, il ne s’agirait selon les nobélisés d’une partie immergée de la réalité. En effet, des emplois peuvent rester vacants pour bien d’autres raisons que le manque d’information.
Les lauréats mettent en avant différents facteurs nouveaux pour expliquer ces phénomènes. En dépit d’un besoin bien identifié, les employeurs peuvent se montrer réticents à embaucher par crainte de coûts cachés. Le niveau et la durée des allocations vont agir sur les motivations du demandeur d’emploi: plus celles-ci sont élevées et étalées dans le temps, plus les chômeurs auront tendance à refuser une partie des offres qu’on leur aura proposées.
Réduire les coûts de licenciement ou les rendre plus coûteux ?
La visée scientifique du trio est de contribuer à résoudre le plus finement possible les dilemmes qui, traditionnellement, marquent la frontière idéologique entre politique de droite et de gauche. Par exemple, réduire les coûts de licenciement pour fluidifier le marché ou, au contraire rendre plus coûteux les licenciements pour réduire le chômage ? De même, ces économistes établissent une corrélation entre la durée des allocations et le taux de chômage qui ne débouche par forcément sur le choix de réduire au maximum l’indemnisation. Car les allocations jouent un rôle à double tranchant : leur générosité a tendance à diminuer l’intensité de la recherche mais à faire progresser la qualité de l’emploi trouvé. Comment se forment les prix sur de tels marchés ? Les gouvernements doivent-ils intervenir pour fluidifier ces marchés ? L’analyse de la structuration des « marchés de recherche » proposée par les trois Nobel 2010 veut être la boite à outils permettant de répondre à ce type de questions.
Pour les travaux pratiques, l’économiste britanno-chypriote du trio s’est montré on ne peut plus clair à Stockholm : « Je conseille fortement aux gouvernements de ne pas laisser s’installer le chômage à long terme en offrant directement des emplois subventionnés aux chômeurs après neuf à douze mois de chômage.” Mode d’emploi de Christopher Pessarides : « En période de récession, vous pouvez bien sûr rallonger un peu la période (d’indemnisation chômage) parce qu’il n’y a pas assez d’emplois, mais pas trop. Vous pouvez l’allonger jusqu’à un an mais je serais inquiet si elle était rallongée sans condition au-delà de 12 mois.«