Le métier de mercenaire a t-il changé avec la mondialisation économique et la nouvelle donne géopolitique ?
Publié le 2 juin 2009 par Les Influences
Philippe Lobjois est écrivain et journaliste-documentariste (Birmanie, ex-Yougoslavie, Tchétchénie, Afghanistan et Irak). Il vient de publier un document captivant sur le mercenariat du XXIe siècle : Mercenaire de la république (Nouveau Monde).
Le mercenaire aujourd’hui c’est Bertrand du Guesclin qui travaille pour le compte de grandes compagnies de sécurité, avec essentiellement des ordinateurs et l’outil Internet. On a son « écurie » et l’on accourt auprès de qui paie : de ce point de vue, tout change, rien ne change.
Mais en fait, il n’y a plus de mercenaires. Ce terme est devenu obsolète.
Il y a désormais des conseillers en sécurité. des experts, des « contractors ». Le métier a changé en moins de dix ans.
En France, la loi de 2003 a obligé les apprentis mercenaires à créer des sociétés ayant pignon sur rue et à démarcher légalement avec des contrats. Cette mesure peut paraître essentiellement cosmétique, elle a eu une incidence certaine sur la perception de ce vieux métier obscur : le vrai avantage c’est que le milieu est devenu attractif, presque sexy et que les « contractors » sont présentables, ce qui n’était pas le cas des mercenaires.
Pour ce qui relève des nouveaux marchés, ils sont vastes car libéralisés à mort. La concurrence est acharnée, et mise pour l’instant sur la sécurisation des sites des multinationales. Il n’y a plus de niches ou de micro-conflits comme ces petites guérillas de type karen, sentier lumineux, ou sandinistes, avec lesquelles les jeunes mercenaires ont débuté dans les années 80.
Les mercenaires comme l’imaginaire collectif les conçoit peuvent se retrouver soit dans les actions de consolidation de pouvoir type garde présidentielle avec envoi de spécialistes en sécurité, soit dans la reprise d’un pouvoir perdu type Madagascar.
Dans ce deuxième cas, il est encore possible de monter une guérilla. Mais globalement le monde s’est rétrécit terriblement, et l’imaginaire avec. La roue a tourné : les conflits en cours sont des vieux conflits gérés par des Etats souverains. L’Afghanistan, la Somalie, l’Irak, le Liban pour les principaux.
Il n’y a plus rien en Amérique latine. L’Afrique demeure encore le continent de toutes les possibilités. L’Asie est trop encadrée et les pays arabes sont stables. La crise mondiale va peut être changer la donne … mais c’est encore trop tôt pour en parler.