Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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#Christophe Prochasson #Edition #EHESS #Sciences humaines

Christophe Prochasson

Publié le 10 juillet 2009 par

Il veut faire L’Europe des éditions, des savoirs et des collaborations intellectuelles en sciences humaines : ce n’est pas gagné !

Christophe Prochasson (Gabriel Pour L’Agence Idea)
Christophe Prochasson (Gabriel Pour L’Agence Idea)
Historien et responsable des éditions de l’EHESS (Ecole des Hautes Etudes en sciences humaines et sociales), Christophe Prochasson est l’un des principaux artisans de la promotion des éditions de SH et des «  savoirs partagés européens  ».

C’est une belle idée qui a suscité enthousiasme (www.amateur-idees.fr/Comment-circule-la-pensee.html#nb1) ou scepticisme (www.passouline.blog.lemonde.fr/2009/06/17/les-sciences-humaines-manifestent/) : «  nous entendons manifester notre engagement scientifique commun pour une Europe des savoirs partagés  » est-il affirmé dans un manifeste, signé, à Paris le 16 juin dernier, par une cohorte d’éditeurs, de chercheurs et de traducteurs.

En Europe de l’Est, la chute accélérée des SH

«  Cette initiative est née de la conférence internationale sur «  l’édition de sciences humaines dans l’Europe élargie  », organisée à l’initiative des Éditions de l’EHESS les 30 janvier et 1er février 2009  », explique Christophe Prochasson à IDEE A JOUR. Participent essentiellement à ce projet, des représentants des anciens pays du bloc Est.

Pourquoi une aussi forte représentativité ? «  L’EHESS, après la chute du Mur, a contribué au redéploiement des sciences humaines et sociales, et des liens se sont faits au fil des années avec les organismes et les éditions SH de la Bulgarie, Roumanie, pays de l’ex-Yougoslavie, Pologne ou République tchèque. On pourrait penser qu’après des décennies de disette intellectuelle, ces anciens pays connaissent un Eldorado des éditions en sciences humaines, il n’en ait rien. Pire, leurs éditions rencontrent en accéléré les mêmes problèmes que chez nous. En Roumanie par exemple, les tirages sont passés en quelques années de 10 000 à 2000 exemplaires.  »

Concurrence de l’Internet et photocopillage, cherté des ouvrages, diffusion aléatoire, suprématie de la langue anglaise, misère de la traduction scientifique : tous les éditeurs SH et les universitaires se retrouvent confrontés aux mêmes problèmes dans l’œil du cyclone numérique, et comme le remarque Pierre Assouline, semblent repoussés l’échéance d’une grande édition SH européenne en ligne.
Pour l’instant, les signataires du manifeste veulent notamment jouer un travail de persuasion –l’action de lobbying serait un terme trop fort- auprès des institutions européennes. Objectif : «  une réelle politique d’aide à la traduction des travaux de sciences humaines édités sous ses divers formats : livres, articles, papier ou électronique.  »

C’est le point le plus politique. L’aide à la traduction dans les différentes langues de l’espace européen aiderait les éditeurs et les universitaires à trouver des débouchés et une meilleure visibilité de leurs travaux.

Ce manifeste milite pour «  la circulation des idées  », celle-ci passe par la construction d’une «  coopération réellement européenne qui ne fait pas du marché le vecteur unique des biens culturels, mais privilégie la réflexion autonome et le dialogue interprofessionnel et international.  »

Le manifeste table ainsi sur la publication simultanée de «  chantiers de recherche où il est essentiel d’adopter un cadre d’analyse européen  ». Pour l’instant, ces chantiers ne sont pas encore ouverts, ni même imaginés. Si les historiens et les politologues ont consenti à quelque effort de coopération et pu décrocher quelque budget transeuropéen de l’ANR, les sociologues semblent se replier sur leur pré carré par exemple. «  Ces savoirs partagés ne sont pas très faciles à organiser, convient Christophe Prochasson. Les grands paradigmes unificateurs sont morts, et fait place à une pluralité de projets et de théories, foisonnante mais peu lisible pour l’instant.  »

Pierre Bourdieu : «  la vie intellectuelle n’est pas spontanément internationale  »

Difficile en effet de faire bouger une sociologie ou une philosophie française qui cultivent une attitude post-coloniale vis-a-vis des pays de l’Est, exportant ses produits d’appel comme Foucault ou Derrida, sans vraiment chercher la curiosité réciproque.
Pour s’en convaincre un peu plus, et avaler son bol de ciguë, on peut se reporter à ces propos de Pierre Bourdieu :

«  On croit souvent que la vie intellectuelle est spontanément internationale. Rien n’est plus faux. La vie intellectuelle est le lieu, comme tous les autres espaces sociaux, de nationalismes et d’impérialismes et les intellectuels véhiculent, presque autant que les autres, des préjugés, des stéréotypes, des idées reçues, des représentations très sommaires, très élémentaires, qui se nourrissent des accidents de la vie quotidienne, des incompréhensions, des malentendus, des blessures (celles par exemple que peut infliger au narcissisme le fait d’être inconnu dans un pays étranger).  » C’était le 30 octobre 1989, dans une conférence tenue en Allemagne sur «  les conditions sociales de la circulation des idées  ».

Vingt ans après la chute du Mur, L’Europe des savoirs partagés, comme celui d’une défense commune, paraît toujours aussi difficile à mettre en place. La guerre des idées est aussi une réalité.

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