Le manuel des maladies psychiatriques rend-il paranoïaque ?
Publié le 4 janvier 2010 par Rédaction LI
Le DSM (Diagnostic and Statistical Manual) est le recensement des troubles du comportement le plus consulté dans le monde. Ses détracteurs l’accusent de créer des millions de faux patients, favorisant l’industrie pharmacologique et des compagnies d’assurance. La prochaine édition vient d’être repoussée de deux ans.
Robert Spitzer et Frances Allen, deux psychiatres américains à la retraite, collaborateurs du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM, Diagnostic and statistical manual of mental disorders) sont-ils des gagne-petits, ou, au contraire, des résistants aux normes mondiales à l’oeuvre de la psychiatrie ?
Pour l’éditeur de cette bible de la classification psychiatrique la plus utilisée dans le monde, l’Association psychatrique américaine (APA), la messe est dite : Spitzer et Allen craignent surtout de ne plus toucher de droits d’auteur après l’exploitation à venir du prochain DSM, dans lequel ils ne jouent aucun rôle. Ces dissidents du DSM se sont mis soudainement à jouer les père-la-pudeur pour des raisons bassement matérielles, et non de fond.
Les psychiatres Spitzer et Allen, eux, ont voulu alerter sur la volonté stratégique du DSM à élargir certains critères diagnostiques. Depuis la 3e édition qui remonte à 1980, les modèles psychopathologiques et les techniques de la psychanalyse ont été en effet mis de côté pour le plus grand bénéfice de l’industrie pharmacologique et des compagnies d’assurance. Le DSM multiplie les catégories psychiatriques. Des années 1950 aux années 1990, les troubles du comportement sont passées d’une centaine à 400. Accusé de normer des troubles bénins à outrance, le catalogue psychiatrique de l’APA rencontre de plus en plus de détracteurs qui l’accusent de préparer le terrain pour crééer toujours plus de nouveaux marchés et de nouveaux malades par millions.
Quoi qu’ il en soit, annoncée pour 2012, la 5ème édition du DSM vient d’être repoussée à mai 2013. Officiellement pour être le plus raccord possible avec la 11e édition de la classification internationale des maladies, établie elle par l’OMS (Organisation mondiale de la santé) et prévue elle pour 2014. Les rédacteurs de l’APA veulent être scientifiquement irréprochables. En attendant, ce manuel des maladies psychiatriques donne l’impression d’appliquer un marketing de la santé mentale.