Tomates couillues
Publié le 10 octobre 2010 par Les Influences
« Tomates » de Nathalie Quintane, aux éditions POL : Viviant cultive son jardin politique.
Justement, ce que Nathalie Quintane travaille dans ce texte, avec classe, des envolées terre-à-terre, humour, c’est justement le rapport. Ce rapport entre tout et le reste qui fonde une historicité, une époque, la nôtre par exemple. « Tomates » (le texte) pousse donc naturellement.
« C’est-à-dire que leur tige, surgeons ôtés, s’était dilatée et munie d’un duvet tout du long, et qu’aux fleurs de petites boules avaient crû, petits pois plus ronds de jour en jour, peau brillante et bien tendue, de la taille à présent de couilles posées l’une sur l’autre — je me souviens qu’en argot portugais on appelle tomates (tomatech’) les testicules. »
Tomates est effectivement un petit livre couillu. Qui, sous ses airs de ne pas y toucher, avec « une intellection sensible », c’est comme ça que Quintane dit et voit les choses, repose à sa manière, plus éclatante qu’éclatée, la grande question léniniste : que faire ? Et, d’abord, puisqu’elle est écrivain, et pas n’importe quel, un écrivain issu d’une famille d’ouvriers agricoles, de ceux qu’à la fin du XIXème, reprenant une idée de Marx, Emile Pouget appelait « l’ouvrier-pommes de terre », comment écrire un texte politique, sans tomber dans le grand style classique, comme Guy Debord (et Julien Coupat) ?
Comme faire aussi un livre politique, agissant, quand les institutions littéraires sont devenus des opérateurs culturels, des sortes « d’agence de tourisme spécialisée en programmation d’événements à forte valeur ajoutée » où « lire est une fête », forcément ? Et puis, dans cette course de lenteur entre l’insurrection qui vient et le fascisme qui vient, l’insurrection qui ne vient pas et le fascisme qui ne vient pas non plus (nous sommes encore en démocratie, non de nom !) comment s’organiser politiquement ? En discutaillant peut-être, comme le fait ici Quintane avec le philosophe Jean-Paul Curnier sur les émeutes en banlieues… « De toute façon, les seuls livres vraiment intéressants, c’est ceux qui sont lus par la police », écrit Quintane. Il n’est pas sûr que la police lise Tomates. Bien sûr, posons encore une fois que celle-ci aura tort.
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Tomates couillues
Pier Paulo Quintane ?