Une forêt qui sent le sapin
Publié le 11 novembre 2010 par Les Influences
Ravagées par la tempête Klaus et un parasite, les Landes de Gascogne survivront-elles ? Un photographe leur dédie un requiem lumineux, et une anthropologue rappelle qu’il y a eu une forêt avant cette forêt industrielle.
Les photographies de Jean Hincker, rassemblées dans un ouvrage intitulé Les Landes, une forêt dévastée (Editions le Bord de l’eau) fonctionnent comme des coupe-claires de conscience. On y voit comment un ogre est passé par là et à tout balayer, soulever, arracher et jeter en mikado. Même les vieux pins élégants et les solides chênes de l’airial n’ont pas échappé au massacre. Troncs écharpés, géants déracinés, chairs éclatées, tordues, et vrillées, arbres bleuis par les parasites… Restent comme témoins de cette guerre, les gueules cassées et les enchevêtrements hallucinatoires d’arbres qui ne s’en relèveront jamais.
Le Grand Cassou et le prêtre exorciste
Le paysage a changé et les repères sont chamboulés. Avec les saignées de la forêt, constate l’anthropologue, la lumière rentre désormais à flots dans les maisons. Que vont devenir les Landes de Napoléon III, quelle stratégie industrielle désormais va façonner la forêt ? Les sylviculteurs ont-ils été des sylvitueurs en s’entêtant à planter du pin maritime aux racines légères ? « La tempête de vent a soulevé une tempête d’interrogations » formule Marie-Dominique Ribereau-Gayon.
Des questions et du désarroi aussi, à l’instar d’André Bordes Vidal, professionnel averti de la forêt, héritier d’une dynastie de sylviculteurs implantée bien avant la décision de Napoléon III : « J’avais mis cinquante ans à reconstituer la forêt. Je me disais : « ton passage sur terre aura servi à quelque chose (…) J’aurai apporté ma petite goutte à la création. » Il ne reste plus grand-chose. Ce professionnel déplore également le manque d’études et de savoir concernant la forêt. « On utilise la forêt, comme la majeure partie de l’humanité, ainsi que le faisaient nos ancêtres dans les cavernes.«