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6 commentaires sur “Gothique Spaghetti

  1. Gothique Spaghetti
    Additif au bonus (excellent) d’Alain Petit, concernant le noir et blanc de L’ORGIE DES VAMPIRES : beaucoup de films sortaient encore en noir et blanc (au MIDI-MINUIT) en 1969 : LE MARQUIS SADIQUE de Gabriel Axel, BREAK UP de Marco Ferreri, LORNA de Russ Meyer, L’AMOUR AUX BOUGIES de Guy Nys, SCENES DE CHASSE EN BAVIERE de Peter Fleischman, THE DRIFTER… pour n’en citer que quelques-uns.

    1. Quelques corrigenda aux présentations
      Absolument ! Et ça continuait pendant et après 1969 à être vrai : LA NUIT DES MORTS VIVANTS tourné N.&B. en 1968 et distribué à Paris vers 1970, LES TUEURS DE LA LUNE DE MIEL de Leonard Kastle tourné en N.&B. et distribué à peu près à la même époque à une année près…

      J’ai relevé d’autres corrigenda qu’on doit objecter aux présentations, en dépit de leur qualité évidente de précision et leur belle documentation iconographique soigneusement sélectionnée et toujours admirablement bien reproduite.

      1)
      Petit est un témoin de première main précieux et un collectionneur dont les archives sont légendaires. Il n’est pas un intellectuel ni un esthète comme l’étaient Caen, Prédal, Lenne, Bouyxou, Sabatier mais il est aussi précis que l’était un Jean-Claude Romer en matière filmographique et biographique. Petit a cependant raté, en outre, quelque chose dans son commentaire de L’ORGIE DES VAMPIRES : la mise en parallèle qui pourtant s’imposait entre L’AMANTE DEL VAMPIRO (1960) et IL VAMPIRO DELL OPERA [Il Mostro dell opera / L’Orgie des vampires] (1960-1961) qui forment un curieux diptyque polsellien et gastaldien. Idées, procédés, casting, conditions de production, désinvolture et liberté en roue libre au sein d’une sorte de cahier des charges contraignant voué au commerce a priori le plus minable. Si Prédal avait pu découvrir en 1970 L’AMANTE DEL VAMPIRO et s’il avait su la date exacte de production de L’ORGIE DES VAMPIRES, il n’aurait pas écrit la même critique virulente de L’ORGIE DES VAMPIRES, du moins pas de la même manière.

      2)
      Par ailleurs, Gérard Lenne dans son propre commentaire historique et esthétique sur L’EFFROYABLE SECRET DU DOCTEUR HICHCOCK commet une erreur filmographique : ce film de 1962 n’est pas le premier film fantastique de Freda tourné en couleurs puisque LE CHATEAU DES AMANTS MAUDITS [Beatrice Cenci] et LE GEANT DE THESSALIE – qu’on peut faire ressortir du genre fantastique : c’est évident dans le cas du péplum I GIGANTI DELLA TESSALIA, et c’est évident dans le cas de BEATRICE CENCI une fois qu’on le replace rétrospectivement, comme le fit si bien Sabatier, dans le courant du fantastique chez Freda (le BEATRICE CENCI de Freda ressort davantage du fantastique que celui de Fulci, contrairement à ce qu’on pourrait croire aujourd’hui) sont tous deux antérieurs à 1962 et tous deux tournés dans de magnifiques scope-couleurs 2.35 !

      3)
      Une remarque générale sur le nom de la collection dans laquelle Artus film rassemble ces titres tous intéressants, les classiques du cinéma fantastique que sont le Margheriti, le Freda comme les films plus mineurs ou curieux que sont le Polselli, le Pupillo : ces films fantastiques italiens n’ont rien à voir avec le qualificatif de “gothique” qu’on leur applique : leur sujet, leur esthétique, le lieu et le temps de l’intrigue sont du début du XXe siècle ou contemporain de leur date de production.
      De même que la Hammer n’a rien à voir non plus avec le gothique, sauf les ROBIN DES BOIS de Fisher et un ou deux autres cinéastes anglais !
      Le seul film fantastique de la collection Artus pouvant être stricto sensu qualifié de “gothique” est l’admirable I LUNGHI CAPELLI DELLA MORTE [La Sorcière sanglante](1964) d’Antonio Margheriti puisqu’il se déroule au moyen-âge.
      Le galvaudage de ce terme est depuis quelques années assez redoutable : il est source constante de confusion esthétique et historique. Ce n’est pas parce que LA VIERGE DE NUREMBERG de Margheriti, VIERGE(S) POUR LE BOURREAU de Pupillo ou GLI ORRORI DEL CASTELLO DI NORIMBERGA de Mario Bava reposent le thème de la résurrection possible d’un ancien bourreau (pas assez ancien pour être qualifié de médiéval ni gothique d’ailleurs : les trois bourreaux appartiennent à l’histoire moderne post-médiévale dans les trois scénarios) que ce sont des films “gothiques” !

      4)Petit a raté aussi, je pense, une belle occasion de se pencher sur un problème matérialisé sous nos yeux par le matériel documentaire admirable qu’Artus a rassemblé : je veux parler de la constante hésitation entre singulier et pluriel dans le titre français d’exploitation VIERGE ou VIERGES POUR LE BOURREAU [Il Boia scarlatto] (1965) de Massimo Pupillo. Les photos d’exploitation françaises N.&B. optent pour le singulier. L’affiche française opte pour le pluriel. L’affiche belge aussi si ma mémoire est bonne. Difficile de dire si le générique français d’exploitation optait pour l’un ou l’autre car il est absent : la copie VF d’époque s’ouvre aussi sur le générique italien au titre IL BOIA SCARLATTO. Ce genre de problème est fréquent dans l’histoire du cinéma, notamment dans l’histoire du cinéma-bis. Il avait donné lieu à bien des discussions sur le regretté site internet belge Cinérivages, fondé par la regrettée Françoise de Paepe. Discussions d’ailleurs aujourd’hui introuvables, disparues, à moins qu’elles aient été imprimées en guise de sauvegarde. Bref…

  2. Gothique Spaghetti
    L’ORGIE DES VAMPIRES sortie 23 juil 1969 CINÉVOG, MAILLOT-PALACE, SCARLETT, MIDI-MINUIT.

    L’EFFROYABLE SECRET DU DOCTEUR HICHCOCK sorti également au MERY place Clichy.

  3. Freda, Polselli, Pupillo
    Une remarque liminaire : “Cinéma-bis” fut d’abord une expression négative, certes, mais ensuite elle fut revendiquée par un groupe de critiques français écrivant d’abord dans MIDI-MINUIT FANTASTIQUE de 1962 à 1971 puis dans les revues CREEPY, EERY et VAMPIRELLA de 1969 à 1975 environ.

    Des trois films, c’est L’EFFROYABLE SECRET DU DOCTEUR HICHCOCK de Freda qui est le film majeur, pour des raisons autant esthétiques qu’historiques sur lesquelles je me suis étendu ailleurs. Ce Freda forme un diptyque esthétique du fait de la présence de Barbara Steele avec LE SPECTRE DU PROFESSEUR HICHCOCK, tourné ensuite. Il est une autre évidente, économique : son budget est plus élevé, son casting supérieur, sa direction de la photo plus sophistiquée que celles du Polselli et du Pupillo. L’image du Freda est naturellement plus belle parce que sa mise en scène obtient sans effort ce que les deux autres n’obtiennent que laborieusement, à savoir, effectivement, une étrange alliance entre cinéma classique, cinéma-bis et cinéma expérimental !

    La VF intégrale ou la VOSTF permettent de reconsidérer L’ORGIE DES VAMPIRES de Polselli (tenu par René Prédal, LE CINEMA FANTASTIQUE, éd. Seghers, Paris 1970 pour un “effarent bâclage” doté d’une référence implicite, dans son titre original, IL MOSTRO DELL OPERA, au livre de Gaston Leroux avec lequel il n’a pourtant aucun rapport : Prédal s’insurgeait contre l’incohérence de la VF exploitée, mutilée sans qu’il le sache) qui est l’autre volet du diptyque formé avec L’AMANTE DEL VAMPIRO (inédit en salles mais télédiffusé en France) du même Polselli : dans les deux cas, quelques minutes de cinéma pur rachètent la pauvreté initiale de l’idée, des moyens. Ce NIGHT OF THE LIVING THEATER, si on peut le nommer ainsi, ce LIVING THEATER du pauvre, existe tout de même et s’approche du surréalisme à plus d’un moment. Le nom AQUARIUS dans la coupure du journal lu au début, évoque rétrospectivement le AQUARIUS [Bloody Bird] de Michele Soavi qui sera aussi un théâtre dans lequel des acteurs – et non plus des danseurs – risquent la mort. Lucio Fulci répondait, dans l’entretien annexé au DVD zone 2 PAL français de sa version de BEATRICE CENCI [Liens d’amour et de sang] (Ital. 1969) lorsqu’on lui demandait de parler de sa période cinéma fantastique : “C’est un cinéma pauvre” au sens strict, fait sans argent ! Polselli et Gastaldi pouvaient répondre ça en 1960 : à partir de rien, ils construisent quelque chose de désinvolte mais parfois de poétique qui aboutit effectivement, avec la patine du temps, à un surréalisme réel, un “surréalisme du pauvre” si on veut.

    VIERGES POUR LE BOURREAU est bien défendu et illustré par Mathis : je ne connaissais que la version mutilée télédiffusée en France et la version intégrale mérite révision. Le jeu dialectique entre spectacle et réalité est au coeur du sujet, de la mise en scène. De là à en faire une sorte de critique nouvelle-vague du cinéma-bis, il y a un pas qu’on peut du coup peut-être franchir. Le charme d’une oeuvre d’art est d’échapper à ses auteurs pour vivre ensuite d’une vie propre : Ralph Zucker et Pupillo ont-ils voulu mettre en abyme les fumetti KRIMINAL et SATANIK, le cinéma fantastique bis (l’argument de intrigue évoque un peu LA VIERGE DE NUREMBERG : un bourreau historique revenant à la vie, réutilisant ses anciens instruments de torture à la faveur d’une visite dans son chateau qui le libère de sa prison… ici presque symbolique)que Zucker avait d’ailleurs assez bien servi – au premier degré – dans LE CIMETIERE DES MORTS-VIVANTS avec Barbara Steele. J’avoue que la séquence de cinéma pur qui trouve grâce à mes yeux et porte le film au degré évident de suréalisme dont on peut le qualifier, c’est celle de la toile d’araignée. Elle est presque moins originale (après tout… LE MYSTERE DE TARZAN, LE VOLEUR DE BAGDAD, LA MORT DANS LE FILET ont précédé VIERGES POUR LE BOURREAU)que l’idée plastiquement si belle de l’Alfa tournant en rond, conduite par un mort, mais est plastiquement si bien faite, hésitant presque entre photo et plan, plan et roman-photo, qu’elle symbolise tout le restant du film à elle seule, son authentique surréalisme, à nouveau.

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