L’hypocrisie protectionniste des Etats-Unis
Publié le 10 février 2014 par Christian Harbulot
Sous le french bashing, les grandes manoeuvres géoéconomiques
La France est souvent montrée du doigt aux Etats-Unis sur des questions morales dans la compétition économique. Deux affaires symbolisent cette tendance au french bashing : le débat soulevé par l’implication de Keolis America (filiale de la SNCF) dans un appel d’offres sur une ligne ferroviaire et le débat hexagonal sur le projet de loi Florange sur les OPA.
Depuis plusieurs années, la SNCF a est accusée par deux élus démocrates de l’Etat du Maryland d’avoir collaboré avec l’Allemagne nazie en transportant des déportés vers es camps de la mort. Ces parlementaires exigent de la SNCF qu’elle indemnise les familles de déportés. Ils légitiment leur approche par l’initiative d’un ancien déporté d’Auschwitz qui est l’auteur d’une pétition qui a récolté plusieurs dizaines de milliers de signatures. Cette attaque informationnelle s’ajoute à d’autres qui ont déjà fait perdre à la SNCF des contrats comme la construction d’une ligne grande vitesse entre les villes d’Orlando et de Tampa. Ce type de polémique n’est pas à sens unique. Les compagnies de chemin de fer américaines ont joué au cours du XIXe siècle un rôle important dans la conquête de l’Ouest américain marqué par l’extermination des tribus indiennes. A partir du moment où des élus américains réclament l’indemnisation des déportés, il serait équitable de réclamer l’indemnisation des familles indiennes déportées dans le cadre de l’expansion territoriale des Etats-Unis d’Amérique sur le continent nord-américain. La timidité de la partie française sur ce dossier est pour le moins significative de notre incapacité à mener des guerres de l’information sous-jacentes aux affrontements économiques.
La France ne peut pas être protectionniste, les USA le sont sans vergogne
Une autre affaire éclaire de manière encore plus didactique notre incapacité à rééquilibrer les termes d’un rapport de force qu’une polémique interne rend défavorable. A l’automne dernier, le débat lancé à propos du projet de loi Florange sur les OPA a donné lieu à une levée de boucliers contre cette démarche gouvernementale qui est qualifiée par des juristes français de mesure protectionniste rétrograde pouvant nuire potentiellement à l’attractivité de la France. Comment expliquer dans ce cas qu’a contrario, le dispositif législatif américain sur les OPA est très défensif et protectionniste. Les juristes français qui protestent contre le projet de loi Florange appartiennent souvent à des cabinets anglo-saxons qui ont pris 80% des parts du marché du droit des affaires. Ces derniers se gardent bien d’initier un tel débat dans leur pays d’origine. La France ne peut pas être protectionniste. En revanche, les Etats-Unis ont le droit de faire ce qu’ils veulent.