Quand la France s’appauvrit par l’absurde
Publié le 21 mai 2014 par Christian Harbulot
Si ce pays n’était plus capable d ‘assumer son avenir ?
Chaque jour qui passe tombe une nouvelle déroutante dont tout le monde s’empresse d’oublier le sens. Les claques économiques s’accumulent. Le dossier Alstom s’ajoute à la pile des précédents (la liquidation du Crédit National, pièce maîtresse du système de financement d’une partie de notre industrie dans les années 80, abandon de Péchiney, cession d’Arcelor). A ces sabordages de notre réalité industrielle s’ajoutent des épisodes kafkaïens comme cette commande par la SCNF de dizaines de TER flambants neufs… mais trop larges pour les quais de nombreuses gares. Ce triste épisode me rappelle l’affaire du Famas. Alain Richard, ministre de la Défense de Lionel Jospin, voulait faire des économies. Il fit arrêter la fabrication des munitions de l’arme individuelle de l’armée française. Une usine fut fermée car elle n’était plus considérée comme compétitive. Mais les entreprises étrangères sollicitées pour nous fournir un produit moins cher nous vendirent des munitions qui n’étaient pas adaptées à l’arme. Pendant plusieurs années, l’armée française dut gérer un stock de munitions incompatible avec les exigences du combat.
Combien de démonstrations par l’absurde de ce type avant de toucher le fond ? C’est la question récurrente qui circule sur toutes les lèvres, excepté au Parlement ou dans le débat public. Notre armée, pour rester sur le sujet, est dans une situation de plus en plus déplorable. La grande Muette garde son sang froid mais elle gère sa misère matérielle de manière de plus en plus visible. La réduction des effectifs, les problèmes financiers affectent désormais les capacités opérationnelles de nos troupes. Combien d’hélicoptères ou de chars de combat en état de marche ? Combien d’avions ? La réduction de stocks de pièces détachées atteint un niveau alarmant. N’a-t-on pas vu ces derniers mois un sous-marin nucléaire d’attaque, la coque traversée par une bielle, remorqué jusqu’à Toulon ? Espérons qu’il s’agit là d’une mauvaise rumeur de plus.
Il est désormais possible de reconstituer les grandes étapes de la déstructuration de notre pensée stratégique
Les puissances qui nous entourent, touchent les profits de notre faiblesse. Le plus grave est que nous avons pris l’habitude de nous taire sur les coups que nous recevons. Et parfois de tendre l’autre joue. La manière dont les Etats-Unis ont empêché la vente du Rafale (à Singapour et aux Pays-Bas) après le refus de la France de participer à la guerre en Irak relève de la Realpolitik. En revanche, notre silence sur ces pratiques d’empire énervé équivaut à une soumission coûteuse pour l’avenir.
La France va mal. Les langues se délient peu à peu. Et il est désormais possible de reconstituer les grandes étapes de la déstructuration de notre pensée stratégique. C’est le sens de ma démarche dans la rédaction de l’ouvrage Sabordage, ou comment la France détruit sa puissance. Esquisse d’une grille de lecture pour tenter de sortir du piège dans lequel nous nous sommes enfermés progressivement, sans chercher à comprendre l’importance des rapports de force dans la vie de tous les jours.
2 commentaires sur “Quand la France s’appauvrit par l’absurde”
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Quand la France s’appauvrit par l’absurde
Deux petites coquilles se sont glissées dans cet excellent article de Christian:
– soumission coûteuse…
– dans la vie de tous les jours.
Bien cordialement.
Quand la France s’appauvrit par l’absurde
Corrigé. Merci