Le mystère des trous dans l’Emmental et dans la psyché humaine est révélé
Publié le 7 décembre 2015 par Les Influences
La grandeur de la recherche consiste à révéler chaque jour des vérités insoupçonnées aux citoyens aussi perdus qu’attentifs à ce qui conditionne la marche du monde. On peut ainsi se réjouir un jour, enfin, de la résolution du mystère des trous dans l’Emmental, grâce au travail d’un institut suisse des sciences en denrées alimentaires, qui a le premier compris que des particules de foin dans le lait dégageaient des gaz provoquant la formation de bulles d’air dans le fromage ! Mais on peut tout autant se surprendre à jubiler, le lendemain, devant l’intelligence d’un philosophe comme François Noudelmann, qui dans son nouvel essai Le Génie du mensonge (Max Milo) analyse le hiatus entre les principes revendiqués avec éclat par les penseurs et leurs vies menées à l’opposé de ces vertus.
Analysant les œuvres de grandes figures de la philosophie comme Rousseau, Kierkegaard, Sartre, Foucault ou Deleuze…, Noudelmann éclaire la torsion féconde par laquelle un déni produit une performance conceptuelle. Par-delà le génie de sa démonstration, l’auteur nous rassure sur nous-mêmes : la cohérence entre la vie et la pensée restant difficile à opérer pleinement, il faut s’en tenir à cette idée selon laquelle la vérité de soi, nue, totale, translucide, n’est qu’un rêve de moraliste. Pour atteindre la vérité, il faut accepter de se diviser, se fragmenter et se trouer comme l’Emmental. Et tant pis pour la morale.
La recherche nous aide ainsi à mieux respirer, c’est-à-dire à accepter les failles béantes et les mensonges que l’on se cache à soi-même, abrités dans les trous de la conscience troublée.