Belin se met au temps présent
Publié le 28 juin 2016 par Rédaction LI
Les historiens Denis Pechanski et Henry Rousso animent cet automne, une collection chez Belin : « Contemporaines » ou comment faire récit du temps présent.
Histoire. Comment passionner un public élargi dans un secteur férocement concurrentiel et sans sombrer dans l’histotainment modèle Deutsch-Bern ou à l’inverse, sans dupliquer pour le lecteur profane, le châtiment d’une thèse standardisée ? Bref, comment se distinguer dans l’offre océanique du livre d’histoire ? Les éditions Belin annoncent une nouvelle collection basée sur « une nouvelle histoire du temps présent ». Dès cette rentrée d’automne, Contemporaines co-animée par les historiens Denis Pechanski et Henry Rousso, proposera une première salve de trois ouvrages, solides comme des pavés (de 400 à 800 pages) : Une guerre d’extermination (Espagne, 1936-1939), de l’historien britannique Paul Preston, L’Orient en questions (XIXe-XXe siècle) de Chaymaa Hassabo, Henry Laurens et Matthieu Rey et le très prometteur Exils arméniens de la chargée de recherche au CNRS, Anouche Kunth. Des poids lourds côtoient ainsi des jeunes pousses de la recherche française. Philosophie générale : » J’ai envie d’être surpris » résume Henry Rousso. » Les écritures et les points de vue seront variés, il y a un esprit dans cette collection qui s’éloignera de l’écriture d’agrégatif » complète Denis Pechanski, directeur de recherche au CNRS et président des conseils scientifiques du mémorial de Caen et de celui du camp de Rivesaltes. La « dream team » de Belin recrutera de nombreux auteur(e)s dans leurs réseaux respectifs, mais pas seulement promet-on.
» Nous assumons une certaine porosité entre notre discipline et d’autres sciences sociales, car cela donne une nouvelle couleur, une autre façon de raconter l’histoire « , explique Henry Rousso, directeur de recherche du CNRS (Institut d’histoire du temps présent) et connu pour ses ouvrages et essais sur les usages de la mémoire et du passé dans les sociétés contemporaines. Et de citer en exemple, ce projet de livre avec une jeune sociologue qui s’est penchée sur l’aristocratie russe à l’heure de la Révolution bolchevique. Ou prévu également en 2017, La maison d’Émilienne (titre provisoire) sur une histoire familiale du génocide rwandais, écrit à deux voix mêlées, celle d’Émilienne Mukansoro, une survivante du massacre, et d’Hélène Dumas. L’année 2017- année commémorative du bolchevisme- verra une nouvelle biographie de Staline, signée Oleg Khlevniuk, mais Contemporaines consacrera de nombreuses jeunes historiennes : Ornella Rovetta (Le Génocide au tribunal), Sophie Delaporte (Visages de guerre-Les gueules cassées au XXe siècle), ou encore Maud Joly (Le Corps de l’ennemie-les femmes victimes du franquisme).
» Nous assumons une certaine porosité entre notre discipline et d’autres sciences sociales, car cela donne une nouvelle couleur, une autre façon de raconter l’histoire du temps présent »
Responsable éditoriale du secteur histoire de l’éditeur, Judith Simony, insiste de son côté sur l’aspect créatif de cette collection : une approche très start up qui fera qu’ « en tant qu’éditeur, nous n’hésiterons pas à prendre des risques ». C’est que, en conviennent Denis Pechanski et Henry Rousso, l’histoire à l’instar des autres sciences sociales, fourmille de dispositifs de recherche tous plus inventifs les uns que les autres mais la relève de jeunes auteurs en direction dudit grand public qui sait écrire et raconter des récits nouveaux de manière contemporaine, reste elle à assurer, si ce n’est à inventer.