Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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Le groom et les grandes oreilles

Publié le 8 janvier 2017 par

Où L’Ours se retrouve à Bornéo avec Spirou et chez Steinbeck avec Mickey.

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J’ai les mains pleines de bijoux. Je ne parle pas des bagues, j’aime bien les bagues, et autres colifichets, montre, bracelets, etc. Que j’aime bien aussi —qui ne sont pas toutefois dans mes mains mais en périphérie d’icelles.
Dans la main droite : Spirou : La Lumière Bornéo (le Spirou de Frank Pé et Zidrou, dit la couverture de l’album.
Dans la main gauche : le Mickey Mouse – Café «  Zombo  » – par Régis Loisel.
Le bonheur peloté à pleines mains. C’est pas souvent mais ça arrive. La preuve.
Spirou ( et Fantasio ) est ( sont ) sans nul doute un des personnages de BD que je préfère, et je me préfère parce qu’il n’a cessé de m’apporter au fil du temps du plaisir, du bien-être, à la lecture et la vision de ses aventures, même quand c’était moins. Spirou je ne vous apprendrez rien fut enfanté par Rob-Vel, assisté par deux autres personnes, en 1938, ce qui ne nous rajeunit certes pas. N’en faisons pas l’historique généalogique détaillée ici, disons qu’il est passé entre plusieurs mains, jusqu’à tomber entres celles de Jijé en 1940, si je ne m’abuse, puis retour à Rob-Vel un an plus tard, si je ne m’abuse toujours pas, et re-retour à Jijé en 43 ( si je ne… bon. ) C’est Jijé qui le co-équipera de Fantasio. Merci Joseph G. Et puis, en 47, 1900, grande date : Spirou et Fantasio tombent dans les mains de Franquin. Le plus grand ( quasiment ) dessinateur au monde.

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Spirou est de retour. Nous en redemandons.

Spirou made in Franquin, c’est un trésor absolu, avec à l’intérieur de la liste des albums de véritables chefs-d’œuvre au sens strict du terme. Un jour, Franquin en a marre. À la suite de quoi, le personnage sera repris en charge par d’autres dessinateurs, comme il se doit. Fournier, Nic et Cauvin pour quelques histoires parmi les moins bonnes, Tome et Janry, Yves Chaland ( Yves Chaland ? oui, Yves Chaland ). Tome et Janry c’est pas mal, mais c’est Tome et Janry… pas tout à fait Spirou. Puis le duo Morvan et Munuera. 4 ans de collaboration, 4 albums. À leur suite, nouveau duo aux commandes : Yoann et Vehlmann. Ça change. Si les scénars ne sont pas au top de l’originalité, et même parfois plutôt foutraques, le dessin s’il n’était pas gâché par une propension aux grands aplats noirs pourrait être ( comme il l’est par ailleurs souvent ) jouissif. A la suite de quoi, plusieurs autres dessinateurs se sont suivis pour des one shots des aventures du personnage, certaines et certain parfaitement lamentables, que je ne citerai pas, certaines et certains admirables tels que Emile Bravo et son Journal d’un ingénu, et le magistral le Groom vert-de –gris, par Yann et Schwartz. Nous passerons pudiquement et généreusement sur Panique en Atlantique de l’omniprésent Trondheim, et Parme. Et voici, merci merci, de nouveau Yann et Schwartz, avec le superbe La Femme Léopard, que suit présentement dans le journal Le Maître des Hosties Noires. Spirou est de retour. Nous en redemandons. Le ciel nous entend redemander, merci le ciel, et nous donne donc, ici présent, le tout simplement magnifique album de Frank Pé et Zidrou : La Lumière de Bornéo.
Les héros on pris de l’âge, un peu, Fantasio n’a plus que deux cheveux hirsutes au lieu de quatre, Spirou porte des lunettes de vue ( demi-lune). Nous retrouvons le Noé formidablement traité, dans le cirque qui l’emploie, avec ses animaux savants: le Noé gentil et timide du chef d’œuvre absolu Bravo les Brothers, revenu sur scène un peu teigneux, et pour cause… nous rencontrerons, comme lui, sa fille Fauvette née d’une union improbable, perdu et retrouvée : un phénomène. Parfaitement à sa place dans cette phénoménale aventure, bourrée de poésie, la belle poésie, naturelle, sans majuscule, celle qui ne fait pas chier le peuple, la discrète, l’alimentaire au bon sens du mot. On ne demande qu’une chose, enfin je ne demande, c’est que Frank Pé et Zidrou poursuivent dans l’enchantement les aventures de ces gaillards-là. Et gaillarde. Pour notre plus grand bonheur à tous.

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Mickey qui cherche du boulot, n’en trouve pas.

Dans la main gauche, maintenant. Celle du cœur.
Mickey-Mouse de Loisel. Autrement dit : Café Zombo.
Un jour, c’est tout bête, l’éditeur Jacques Glénat propose à Régis Loisel de faire son album Mickey. Il n’est pas fou, il ne lance pas ça au hasard, il sait bien que Loisel est fan de la souris en culotte rouge à boutons dorés. Parce qu’en somme il a une idée derrière la tête, l’éditeur, constituer une collection de fans amoureux de ladite souris. Pas n’importe quel Mickey, hein ? Celui des années trente. Le pur, le dur. Le vrai. Et son univers avec, cette «  ambiance de maisons en bois et de vieilles palissades  », dira Loisel. A juste raison. Années 30 US, donc. Les expropriations, le chômage, En un combat douteux , À l’Est d’Eden, Le Petit arpent du Bon Dieu, Des Souris et des Hommes… Cette ambiance. Et Loisel de nous concocter une histoire de combat «  douteux  » social dans la ligne de Steinbeck, tiens, et pourquoi pas ? Mickey qui cherche du boulot, n’en trouve pas, part en vacances pour oublier la déveine, en compagnie of course de Minnie, de Horace Horsecollar son pote, de Clarabelle la copine du précédent, à la campagne chez Donald Duck qui possède un bateau, histoire de se baigner, de se dorer la pilule au soleil, d’aller à la pêche et de faire, donc du bateau. .. C’est le bon temps. Mais au retour, changement de décor. On démolit le quartier, on expulse à tour de bras, on rachète à vil prix les terrains et les maison pour construire tenez vous bien un terrain de golf à usage des riches puissants. Au grand préjudice bien entendu des petits et des faibles. On ne se contente pas de cela, le système est rôdé : on exploite les exploités sous deux formes : en les volant, en les obligeant à travailler pour les nantis exploiteurs. Et ceci en les transformant en accros drogués hallucinés zombifiés au Café Zombo, qui «  donne de l’énergie dès le matin  », et plus tard aux hamburgers spéciaux dont l’odeur enivrante fait vriller les synapses. Tout ceci, ce procédé, cette arnaque, manipulée et ordonnée par une brochette de méchant plus méchants que nature, forcément, parmi lesquels nous retrouverons en séides obligatoires l’incontournable Pat Hibulaire, le ricaneur Chicaneau, et dans le rôle du banquier véreux coordinateur du grand bazar cette grosse vache ( qui n’en est pas une ) de Rock Füller… N’oublions pas les cuisiniers Max et Ronald, ni non plus, coté gentils, ce bon Dingo et le chien Pluto.

C’est un festival. Un album de grande classe, de 75 pages, format magique à l’italienne, couleurs d’époque, en strips. Un bijou, réellement. Et le trait, le dessin de Loisel ( en plus de son scénario) tombé tout droit de ce temps là et comme on le dirait du crayon de Gottfredson le créateur, mais quasiment en mieux, parce que décor plus fouillé, mouvement plus vivant et énergique… C’est à la fois «  comme si  » et «  autrement plus mieux », comme si l’élève par la force des choses s’était mué en maître. On sent, dans ce dessin, cette histoire, à un point rare tout le plaisir, le bonheur pris par son auteur à la dessiner. Et ce plaisir, ce bonheur, transmis via la vision par une espèce de capillarité de lecture au lecteur spectateur que nous sommes. Que je suis, en tout cas. C’est un album à lire et relire, à posséder en quinze exemplaires, pour ne pas l’user trop vite. De la joie, quoi.

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