Nicolas Gary : « Actualitté est devenu crédible avec le Covid »
Publié le 26 mai 2020 par Rédaction LI
Confinement, déconfinement. Quels sont les effets de la pandémie sur la politique, les médias, la recherche, les professions intellectuelles ?
Zoom sur le pure player consacré à l’actualité du livre qui a permis durant le confinement, d’être un lien social avec les libraires.
La veille du 17 mars et de la décision gouvernementale de confiner, Nicolas Gary se débattait avec des cartons de déménagement, qu’il remettra à plus tard. Le fondateur d’ Actualitté, média numérique spécialisé dans l’actualité des métiers du livre, ignorait que l’on allait fermer les librairies, cadenasser les entrepôts des distributeurs, verrouiller les maisons d’édition –et que des tas d’auteurs allaient noircir leur existence de journaux de confinement, entre leur bureau et le bac à sciure du chat : « Il a fallu réinventer très vite notre média. La grande question s’est imposé à Antoine Oury le rédacteur en chef et la petite équipe de journalistes disséminée : quel contenu sachant que le monde, celui des livres, allait s’arrêter ? Nous avons privilégié Aristote : educare, movere, placere » résume l’ex-professeur de latin (Si vous n’avez pas appris le latin, faites-vous un tuto durant le second confinement). Pour assurer le flux d’infos (25 à 30 articles/jour), le contenu du site a été modifié. Prime à la découverte de textes en libre accès. Plein feux sur les débats, les controverses et les initiatives sur les réseaux sociaux. Informations et agora pour les professionnels du livre.
« Notre ligne éditoriale durant la pandémie, c’était Aristote : educare, movere, placere. »
Des deux mois du grand confinement, la joyeuse start-up de 6 journalistes aurait gagné 20 000 lecteurs de plus, à en croire les abonnements à la newsletter d’information. « Je crois surtout que la profession a changé de vision en ce qui nous concerne, la crise du Covid nous a rendu plus crédibles, analyse Nicolas Gary. Des libraires, c’est flagrant, qui nous ignoraient se sont mis à s’intéresser à notre travail de chambre d’écho des questions professionnelles et sociales. Chez Actualitté, nous défendons depuis toujours, les deux maillons les plus faibles de la chaîne de l’édition, soit l’auteur et le libraire. » Qu’est ce qu’être libraire et quelle est son utilité sociale ont été en effet des questions lancinantes. Alors que le SLF (Syndicat de la Librairie française ) avait admis la fermeture des libraires, les dissidents se sont manifestés auprès du site Web, et ont raconté au fil des jours, comment eux, entendaient ne baisser ni les bras ni leur grille de magasin, inventant ici le le pick & collect, le système de la vente à emporter, le driving livres, et même la livraison à domicile. « Ça a été passionnant à suivre. On n’est pas Le Canard Enchaîné, ce qui était notre fantasme au tout début, pas plus que Zorro ou Batman, mais être au plus près du terrain où grouillent actions et expériences, voilà notre truc. Pas d’affliction, du positif et des questions que l’on avait oublié de se poser. On apprend beaucoup de choses sur la société lorsqu’on s’intéresse à ce secteur. Le monde de l’édition agrandit la visibilité des dysfonctionnements et des points noirs. »
« Bien sûr, nous avons aussi perdu des plumes avec le Covid-19. »
Dans la grande ombre de l’institutionnel Livres Hebdo, émanation du Syndicat national de l’Édition, Actualitté a longtemps joué le rôle négligeable d’ « un web-zine de jeunes branleurs » farfelus et fantasques, selon les mots de son créateur nouvellement quadragénaire.
En 6e, le jeune Gary avait émis deux souhaits d’avenir : être tueur à gages et lire des livres. Il devrait finir par y arriver.
Lire sur notre site : LCP à l’épreuve du Covid-19.