Quand la télévision suisse se met à la langue inclusive
Publié le 5 mars 2021 par Les Influences

Coïncidence ? Quelques mois après le scandale Darius Rochebin, du nom de cette superstar suisse de l’entretien écharpée par des accusations de harcèlement, qui a valu au groupe TF1 de geler son entrée en fanfare sur LCI, voilà que son ex-employeuse, RTS, se met au langage inclusif et épicène (neutre) à l’antenne. Sur son site Web, la chaîne de télévision de service public explique sa démarche depuis le 16 février avec un podcast Le Point J au ton cool et assuré. Sa productrice-animatrice Caroline Stevan y interroge ainsi le linguiste Daniel Elmiger qui insiste sur le savoir-vivre d’une telle langue, et rappelle que l’université de Neufchâtel ou encore la Confédération pour ce qui concerne les textes en allemand s’y sont mises sans mollir depuis 2019. Cette révolution culturelle à la télévision agace le quotidien Le Temps – dont l’enquête d’investigation est à l’origine des ennuis de Rochebin. Dans un papier tout d’ironie, publié le 2 mars, la journaliste Laure Lugon explique : « Soucieuse de promouvoir l’égalité, l’entreprise de service public est l’un des premiers médias en Suisse romande à adopter officiellement le langage inclusif et épicène à l’antenne et sur ses autres vecteurs de communication, en adoptant un guide et en mettant sur pied des formations. Exit le masculin générique ou les formules “hétéronormées”, bienvenue les doublons. »
Une entité « transversale » très peu démocratique
Mais elle s’inquiète également : qui a décidé d’imposer cette nouvelle façon de parler sur les antennes d’un service public ? Officiellement, le directeur Pascal Crittin. Cette charte du nouveau parler (qui n’est pas un acte militant mais une action de sociabilité, veulent convaincre les éléments de langage de la direction de la communication) était dans les tuyaux dès 2019, mais elle aurait été portée par un collectif féministe de salariées et de salariés de la RTS totalement anonyme. L’enquêtrice du Temps l’affirme : « À y regarder de plus près, c’est à cause de la puissance de feu du collectif dit du 14 juin. Né à l’occasion de la grève des femmes, il est issu d’un simple groupe WhatsApp. Particularité : les membres de ce collectif sont anonymes, aucune représentante n’est formellement votée, cette “entité transversale” n’a ni assemblée constitutive, ni charte. Beaucoup s’inquiètent à la Tour de cette prise de pouvoir par ce groupe mais ne peuvent le dire que sous couvert d’anonymat. Ceux qui ont osé s’exprimer ont été priés de se taire ou font l’objet d’un procès en sorcellerie. “Pourtant, le collectif recense une centaine de membres, et nous sommes au total plus de mille. Faites le compte”, murmure une journaliste. »