À chacun son Pap Ndiaye : Jean-Pierre Chevènement critique sa nomination, Science Po monte au créneau
Publié le 23 mai 2022 par Les Influences
L’info : la nomination au ministère de l’Éducation nationale, de l’historien des discriminations raciales a déclenché la critique, entre autres, d’un soutien d’Emmanuel Macron, tandis que la direction de Sciences po Paris la défend vent debout.
Cool ou Woke ? Carriériste ou transcendé par la république ? Indigéniste caché ou honnête homme ? Après les critiques féroces et pavloviennes venues de l’extrême droite, mais aussi de militants de la laïcité et de traqueurs de dérive racialiste, une autre voix a marqué sa désapprobation quant à la nomination, le 20 mai, en tant que ministre de l’Éducation de l’historien Pap Ndiaye. Il s’agit de Jean-Pierre Chevènement, 83 ans, président de la Fondation Res publica et soutien à la présidentielle d’Emmanuel Macron. Le communiqué de l’ancien ministre de Lionel Jospin, émis le 23 mai et repris par l’AFP, pointe l’inquiétude de ce que cette nomination signifierait « l’enterrement de la politique mise en œuvre par Jean-Michel Blanquer depuis cinq ans ». Et de redouter une désorientation générale de la rue de Grenelle : « Il n’y a pas plus sûre méthode pour désorienter une grande institution comme l’éducation nationale que de la confier tour à tour à deux ministres dont les philosophies de l’État s’opposeraient ».
Des prises de position compréhensives, ainsi que des réfutations de l’historien sur les influences de la pensée wokiste et de la cancel culture, mais également sa participation active en 2005 au sein du CRAN (Conseil représentatif des associations noires) ont fait tiquer celui qui fut un populaire ministre de l’Éducation nationale (1984-1986) : « Pense-t-on que le différentialisme promu par la gauche américaine (à travers le Conseil représentatif des associations noires, par exemple) puisse contribuer à l’égalité républicaine ? »
Les critiques envers Pap Ndiaye : « emblématiques de cette méconnaissance, trop largement partagée, de l’enseignement supérieur et de la recherche, teintée de mépris pour les sciences humaines et sociales.»
Laurence Bertrand Dorléac et Mathias Vicherat
Sans surprise critique, mais avec vigueur, Laurence Bertrand Dorléac, présidente de la Fondation nationale des sciences politiques, et Mathias Vicherat, directeur de Sciences po, eux, se sont fendu d’un long communiqué commun, en forme de toast, défendant la stature intellectuelle et morale de l’historien, par ailleurs enseignant dans leur établissement depuis 2012.
Et de sortir également l’arme rhétorique de l’anti-intellectualisme : « Celles et ceux qui, dès sa nomination, ont engagé une chasse aux sorcières à son encontre sont emblématiques de cette méconnaissance, trop largement partagée, de l’enseignement supérieur et de la recherche, teintée de mépris pour les sciences humaines et sociales. Les nuances de la pensée, le doute méthodique, les principes de l’enquête, les subtilités de la controverse scientifique, leur sont étranger. Ils nous donnent, par les voies étriquées et tortueuses de la malhonnêteté intellectuelle et de la vacuité argumentative, un bel exemple de la nécessité brûlante d’accorder la plus haute importance à la formation (de l’école primaire jusqu’au doctorat) et à la recherche.»