Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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#démagogie #Pouvoir intellectuel #Sciences sociales

Pourquoi les sciences sociales sont abjectes

Publié le 7 février 2023 par

Le Point de Vue. En latin, abject désigne avec justesse ceux qui s’éjectent au loin. Tout à fait, la trajectoire de scientifiques du social et de l’humain.


Récemment un magazine de syndicat d’éditeurs claironnait : « Sciences humaines et sociales : les boussoles d’un monde en crise ». Il s’agissait du chiffre des ventes, évidemment, comme si vendre plus de dentifrice pouvait être un indicateur de santé dentaire. Et les deux inculturés qui ont fabriqué l’article ajoutent : « Elles sont réputées difficiles » mais « elles sont sorties de leur carcan universitaire ». C’est un syllogisme complexe (de pigistes mais un syllogisme complexe tout de même) :  a) les sciences humaines sont réputées difficiles, b1) or il existe un carcan (=difficulté) dû aux profs, mais b2) les livres se vendent mieux, or c) le carcan a tombé (ou est tombé, selon que vous privilégiez l’état ou l’action), donc d) c’est grâce aux vendeurs qui « ont de quoi se réjouir ». Quant à l’hyperbole « monde en crise », il ne faut pas exagérer mais sagement commencer par définir et « monde » et « crise ». Mais pour faire ça, il faut penser. Suffirait d’ouvrir des textes de philo, ah, non, mais quel carcan ! L’inculturé (involontaire de culture) est la forme journalistique de l’ « incel » (involontaire du célibat).

Il n’ y a pas « de quoi se réjouir », ni même d’en jouir : quand une société perd ses repères (quels qu’ils soient) les gens se raccrochent à n’importe quoi et surtout pas à la pensée. Mais d’elle ils veulent la solution en boîte, ses produits dérivés prêts à consommer. Généralement ce « n’importe quoi » est l’adaptation paniquée ou négligente de pensées complexes que les gens (à cause du « carcan » qu’est la pensée)  trouvaient « difficiles », ou simplement dont ils avaient entendu parler à la télé, par quoi ils étaient vaguement impressionnés, se sentant un peu bêtes à côté, ou citaient dans une conversation près de la machine à café (du genre : « évidemment c’est de l’IA ! »).

À chaque crise de société, on assiste à une montée au front de fausses sciences, sortes de dérivés populistes de pensées jusqu’alors réservées à ceux qui pensent, pas à ceux qui dépensent. Avant la crise on pense, avec la crise on dépense.

Des exemples rapides. Au moment où la culture gréco-romaine s’effondra, il y eut une vague de cultes gnostiques bref de charlatans beaux parleurs qui vendaient du « savoir » en tout genre. Au moment où la société médiévale battait de l’aile dans les bouleversements politiques du XIVe siècle, l’alchimie sortit du « carcan » des philosophes et entra aux cuisines des jobards : on va faire de l’or, messeigneurs ! Fin du XVIIIe, l’Ancien régime craque, et l’électricité qui fait pâmer ces dames, devient le remède social miracle avec mesmérisme, psychofluidisme et magnétisme  jusqu’à la vogue de la Société de l’harmonie universelle – qui fera la fortune de ses actionnaires. Bref à chaque fois que les amarres sont larguées, vendre, vendre, vendre de la fausse science, de la demi-philosophie, du tiers de pensée – ce qui « a de quoi réjouir » les marchands.

Écoutez donc les «  spécialistes » en science politique : c’est  du commentaire tarabiscoté, ou naïf, normé, à la base, par des convictions personnelles, souvent de classe ou de statut, mais ledit commentaire est passé au moule d’un langage qui se prétend scientifique, et servi par une élocution empressée.

Ph.-J.S.

On le sait, à chaque fois, le holà aux marchands du Temple fut intellectuel et brutal : les Pères de l’Église, qui ne badinaient pas avec la pensée, ont mis bon ordre aux élucubrations magico-populistes ; l’État centralisé et financier prenant forme au XVIIe a jeté aux oubliettes les falsificateurs  en tout genre;  et la guillotine des Droits humains a mis les têtes électrisées au panier.

Donc, quid de ce clivage entre ceux qui savent et ceux qui savent-comme-ça : les savants (les moraux) et philosophes (les exacts) ne s’attendent jamais à ce que leurs contemporains, moins sujets à la pensée (car ceux-ci travaillent vraiment, donc ont d’autres soucis), puissent comprendre leur savoir. Ils savent aussi que les premiers à souffrir de la colère populaire, quand il n’est pas possible de la réfréner ce sont les savants, poètes et philosophes, boucs émissaires parfaits. Ils sont donc souvent prudents, pendant que certains de leurs confrères sautent la barrière.

En effet le peuple n’aime pas les gens qui savent, sauf ces savants qui passent de leur côté, et se prêtent au jeu du copain-copain qui est aussi un troc lucratif. Précisément ces derniers, qui détiennent un savoir complexe, s’en servent alors pour des ambitions pécuniaires ou égotistes, qui sont comprises et admises et reconnues, immédiatement, par le vulgum pecus. Les gens se disent alors : « Tiens, au fond ils pensent comme nous, et ils sont comme nous ! »  Justement pas à l’origine, mais désormais justement oui. Mais du coup ces faux-monnayeurs n’appartiennent plus au domaine de la pensée. Ces savants sont abjects, au sens où « abjects », en latin, désigne avec justesse ceux qui s’éjectent au loin – ici, loin de leur domaine propre. Ces abjects sont hélas, ou pas hélas selon votre opinion, depuis au moins un siècle, les fameux scientifiques humains et sociaux, vocable insupportable en français mais que l’anglais langue commerciale tout à fait apte à fabriquer des étiquettes de merchandising appelle : « human and social scientists ». C’est net.

Or ces sciences sont, on le sait, de fausses sciences qui ont, dès l’origine, substitué à la difficulté de la méthode expérimentale et à la rigueur logique dans les démonstrations, des préjugés idéologiques, soit qu’elles les habillent d’un langage souvent cousu de néologismes, pour en imposer aux fashionistas intellectuels, soit qu’elles collent par mimétisme aux sciences exactes en en imitant les idées. Ce sont là des sciences à la fois abjectes et ventriloques. Comme les thaumaturges et saltimbanques religieux  de la fin de l’empire romain. Écoutez donc les «  spécialistes » en science politique : c’est  du commentaire tarabiscoté, ou naïf, normé, à la base, par des convictions personnelles, souvent de classe ou de statut, mais ledit commentaire est passé au moule d’un langage qui se prétend scientifique, et servi par une élocution empressée, magistrale, soucieuse, bref : je vous apporte la vérité. Non, de l’opinion travestie.

Evidemment que « ça » se vend. Mais la Bible, hors Islam, ça se vend encore mieux, et sert souvent, si on est un véritable croyant, d’explication à tous les problèmes personnels. La Bible est la première science sociale, et humaine. Et le Coran chez les autres aussi, à preuve l’immense bibliothèque du Djihad qui n’en est qu’un commentaire continu.

Je ne sais pas par qui ou comment déchanteront les producteurs de ces sciences humaines abjectes, ces vendeurs de « snake oil » aux gens  effectivement déboussolés, mais il est certain que les prétentions hyperboliques des scientistes humains et sociaux à tout résoudre, à aider à tout, à « fournir des réponses » à tout, à inventer, comme en management, un slogan résolveur à l’année pour améliorer le rendement, ne vont qu’accélérer la crise de civilisation, et la crise de conscience qui frappent la France (le monde ? vaste sujet …).

Il faudrait enfin faire remarquer aux deux inculturés du magazine en question qu’une boussole n’a de sens que si on sait la lire, et d’abord trouver le nord magnétique, et savoir ce que c’est. Car la définition de ce nord, pour simple qu’il paraisse, est tout de même le fruit de la pensée scientifique. « Boussoles d’un monde en crise ? », certainement pas puisque ces fausses sciences ignorent justement ce qu’est le nord.


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