Bruno Fuligni
Publié le 9 juillet 2009 par Les Influences
Editeur, auteur de nombreux livres. Derniers ouvrages : « La Parlotte de Marianne » (Horay) et le magnifique « Dans les secrets de la police » (L’Iconoclaste).
La défense du papier, parce que celui-ci est gage de culture et de liberté. Je suis agacé de voir se développer une nouvelle forme de barbarie tendant à considérer que le papier, c’est mal. Cette idéologie a un mot d’ordre, le « zéro papier », emblématique du charabia propre aux pieds plats qui peuplent les technostructures. Cette idéologie a des prétextes – la modernité, la défense de l’environnement – mais ceux-ci ne tiennent pas. Un livre imprimé il y a cinq cents ans est toujours lisible sans qu’il soit nécessaire d’activer des moyens techniques spéciaux ni de consommer de l’énergie, ce qui n’est pas le cas d’un vieux fichier informatique. Au reste, s’il s’agit d’enrayer la déforestation, c’est plutôt les emballages et les papiers absorbants qu’il faudrait contingenter ; mais, comme par hasard, c’est à la presse, au livre et au courrier qu’on en veut, preuve qu’ils ont conservé leur puissance subversive et donc leurs adversaires. Le papier nous révèle aussi ce qui était écrit à un moment précis du temps, avec toutes les garanties que cela comporte par rapport à la énième mise à jour d’un document virtuel : il nous prémunit donc des tentatives de lissage et de manipulation.
Bref, ne laissons pas venir un nouvel âge de l’autodafé, celui de l’autodafé préventif et bienveillant, au nom du saint clavier et de la sainte écologie.