Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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#Editions Intervalles #Guillaume Jan #Le Cartographe

Guillaume Jan, l’écarteur

Publié le 14 avril 2011 par

Dans Le Cartographe, son premier roman, il met en scène la désorientation masculine à travers une errance balkanique.

Guillaume Jan Lazare a un quart de siècle. Il accompagne Les Brutes, un groupe de rock breton, à Sarajevo, où tout s’embrouille, se brouille et se débande. Le jeune homme prend les chemins de traverse pour retourner à Paris. En chemin, il s’égare, il biaise, il se défausse, il se retourne et se détourne. Un Ulysse low cost. A quoi servent les Balkans du XXIe siècle ? A se perdre. La seule vraie boussole de Lazare est le verso vierge de sa carte de l’Europe, c’est là qu’il consigne les impressions de son voyage du retour de plus en plus déjanté. De Sarajevo, le périple le mène dans les limbes de Tirana, Skopje, Bucarest, Odessa ou Prague.

Déjà auteur d’un ironique récit de voyage, le Congo à l’heure d’Internet et des trafics de diamants, Le Baobab de Stanley (François Bourin Editeur, 2009), Guillaume Jan (1973), un journaliste de presse magazine qui rêve de grand large, se délivre avec son premier roman. Dans son grand-reportage vrai, il partait pour oublier une femme aimée. Dans cet ouvrage de fiction, son alter-ego Lazare zigzague avant d’affronter Elena, amour en friche, femme-cygne inaccessible à Paris, mais aussi ses parents qui l’ont chassé du foyer et de l’histoire. C’est un premier roman, comme une première escale dans un port improbable, toujours solaire, avec son quai de guingois, ses murs enchaulés et sa poussière d’or, ses fagots de phrases un peu foutraques et ses brasiers jubilatoires, et toujours le regard en coin, inattendu, empli de bonté ou de haine létale d’une rencontre. Avec un talent de petit oiseau rapace, Guillaume Jan pointe du bec les lièvres du bonheur. Tout en pointe sèche, il trace la carte superbement désorientée d’un jeune homme moderne dans un puzzle balkanique des frontières et des sentiments. Dans ce roman voyageur encore, les dialogues, ce que l’on appelle des échanges, sont faibles et indigents parce que les langues font barrières de pudeur, mais cet écrivain là n’est jamais à son meilleur que lorsqu’il monologue, cartographiant son propre désarroi et ses apories.

Car au delà du voyage littéraire à la Bouvier, il s’agit ici d’un rêve sans trêve de puissance enfantine. Lazare traverse les villes de l’Europe de l’Est, croise des existences prises par la solitude, l’esprit de tragédie grecque, l’héritage de la guerre froide ou encore, le destin d’un roman russe sans que l’on y voit grand chose en vérité. Il se joue des frontières et des douaniers de toutes sortes, prend en contrebande les trains de marchandises, échappe à la police et à l’infortune, aux morsures d’un chien fou et au couteau d’un clochard cruel pour revenir clandestinement, tel Fantomas, dans la chambre de son enfance (Paris ne figure pas comme ultime destination exotique sur la carte que l’éditeur a inséré dans le roman). Ce Lazare qui revient de parmi la réserve de morts-vivants fait son deuil, celui d’une génération qui, dépouillée du travail assuré et des projets collectifs, d’un lieu, du goût de l’avenir, du sexe et de la politique, feint d’en accompagner le mouvement avec cette seule question qu’il écrit en dernière phrase de sa carte : « Est-ce que j’avancerai sans chagrin quand je n’aurai plus que le ciel sur la tête ?« 

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