Les errances de l’empire américain
Publié le 13 juin 2014 par Christian Harbulot
70 ans après le Débarquement, les Etats-Unis se cherchent de nouveaux alliés : à marche forcée
L’affaire de la BNP n’est pas un fait divers. Les Etats-Unis ont pour la première fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale décidé de passer en force pour imposer leur volonté à leurs alliés. L’ampleur de la crise des banques américaines de 2008 et la menace d’affaiblissement du dollar comme marque inavouée de domination impériale sur le reste du monde sont des coups de semonce dont les ondes de choc poursuivent leur cheminement souterrain. Le monde n’évolue pas comme le souhaiterait la Maison Blanche. L’Asie n’est pas une nouvelle source de prospérité pacifiée, offerte aux appétits du commerce nord-américain. La Chine n’est pas un pays partenaire. Elle est un empire en cours de développement, qui a gardé la mémoire des guerres de l’opium et de la manière méprisante dont l’ont traitée les empires européennes et les Etats-Unis d’Amérique au XIXe siècle. Ses intérêts présents et futurs sont loin d’être convergents avec ceux de Washington. Il s’agit là d’une évidence qu’il serait irresponsable de ne pas prendre en compte.
Dans ce chaudron mondial qui bout pour l’instant à feu doux, les Etats-Unis se voient contraints de resserrer leur emprise sur l’Europe
Les jeux de puissance sont de plus en plus contradictoires comme l’indiquent les tensions entre la Chine et le Japon, la méfiance de l’Inde par rapport à la politique de grignotage territoriale de l’empire du Milieu, la défiance du Japon à l’égard de la progression conquérante Corée du Sud, qui s’étendent à l’ensemble de la zone asiatique. De leur côté, les Etats-Unis ne sont pas une puissance philanthropique. Ils ont un sens profond de leurs intérêts depuis leur naissance. Et le discours du Président Obama prononcé lors des fêtes commémoratives de du D-Day est à l’image de l’histoire épurée de ses contradictions multiples. Rappelons pour autre mémoire la volonté des Etats-Unis de se substituer aux empires coloniaux afin de devenir la puissance dominante, les volte-faces successives par rapport au régime nazi.
Dans un premier temps, des cercles influents proches de la Maison Blanche ont soutenu le nouveau régime à qui la banque de réserve fédérale prêta d’ailleurs en 1934, la modeste somme de 30 milliards de dollars, en espérant sans doute que l’Allemagne dirigée par Hitler pourrait s’opposer à la menace bolchévique plus efficacement que les démocraties européennes. Dans un second temps et compte tenu de l’évolution des évènements, les Etats-Unis décidèrent de s’opposer aux projets de conquête nazis qui devenaient contradictoires avec leur propre stratégie.
En 2014, les lignes ont plus que bougé.
Les actes d’apprenti sorcier commis par les Etats-Unis après septembre 2001 commencent à montrer leurs limites. L’évolution cataclysmique de l’Irak en est le symbole parlant, tout comme l’Afghanistan et la Syrie.
Les signaux faibles de l’errance manœuvrière des gouvernances américaines, républicaine comme démocrate, se multiplient: déstabilisation du Moyen Orient, reculs américains en Géorgie et en Ukraine, difficultés à contrer la volonté russe exprimée par Vladimir Poutine de préserver l’intégrité du périmètre stratégique de la Russie. Dans ce chaudron mondial qui bout pour l’instant à feu doux, les Etats-Unis se voient contraints de resserrer leur emprise sur l’Europe. Sommes-nous prêts à accepter cette nouvelle forme d’« alliance » en souvenir des soldats américains tombés le 6 juin 1944 sur les plages de Normandie ?