Influences (n. fem. pluriel)
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Les Influences

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Le Nudge : Comment la théorie du coup de coude a pris un méchant coup de pied

Publié le 21 octobre 2012 par

Le «  nudge  » ou encore «  paternalisme libertaire  », une théorie des neuro-économistes Cass Sunstein et Richard Thaler, pour pousser les gens à agir dans «  le bon sens  », était la coqueluche de l’administration Obama. En moins de cinq ans, elle a été essorée par le principe de réalité politique.

bioduneidee_250.gifLa pensée économique a connu une profonde révolution depuis les travaux du prix Nobel Daniel Khaneman sur l’économie comportementale. En gros, le modèle traditionnel de l’agent rationnel qui effectue ses choix dans l’optique de maximiser ses profits est dépassé. Les économistes ont découvert que, loin d’être de purs esprits, nous possédons des «  biais cognitifs  », des réflexes conditionnés innés qui influencent inconsciemment notre comportement. Or, ces derniers sont bien plus importants dans nos décisions que la réflexion rationnelle.

Restait à transformer cette théorie en un système de politique publique. Ce pas fut franchi avec la parution en 2008 du livre de Thaler et Sunstein, Nudge (« coup de coude »; traduit en français sous le titre Nudge : La méthode douce pour inspirer la bonne décision).

L’architecture du choix

Dans cet essai, les auteurs défendent la notion de « paternalisme libertaire ». Exemple très simple: si vous désirez que les consommateurs d’un restaurant fassent plus attention à leur ligne, placez le bar à salade avant le stand des plats en sauce ou des frites. Les gens auront spontanément tendance à choisir les crudités, de préférence aux mets plus riches.

L’idée de base est de toujours faciliter la « meilleure option ». C’est ce que les adeptes du Nudge appellent « l’architecture du choix ».

En fait, il s’agit d’un vieux truc de marketing, comme celui qui consiste à mettre les produits offrant le plus de marge au commerçant sur les rayonnages les plus accessibles. L’idée défendue dans Nudge consiste à utiliser ces techniques en matière de politique publique pour lutter contre l’obésité, favoriser le recyclage, réguler la consommation d’énergie, etc.

Coauteur de l’ouvrage, Cass Sunstein, a été nommé en 2008 chef de l’autorité des régulations du gouvernement Obama, signe de l’intérêt porté à l’époque par les démocrates pour cette nouvelle théorie économique.
Mais le président américain n’est pas le seul à avoir été séduit.

Le premier ministre britannique s’est lui aussi enthousiasmé pour les idées issues de l’économie comportementale. En 2008, David Cameron a ainsi rencontré Richard Thaler. Alors qu’il était encore dans l’opposition, nous raconte le Telegraph, il avait été impressionné par Nudge qu’il avait demandé à tout son « shadow cabinet » de le lire. Une fois au pouvoir, Cameron a créé une équipe la « Nudge Unit » consacrée à étudier le moyen de pousser les citoyens britanniques a prendre les « bonnes décisions ».
Exemple des mesures préconisées par la Nudge Unit, tout conducteur sollicitant un permis ou son renouvellement se voit demander automatiquement s’il souhaite devenir donneur d’organes dans l’imprimé qu’il doit remplir.

Autre exemple, l’adoption d’un code couleur sur les produits alimentaires indiquant facilement lesquels sont les plus sains ou les moins caloriques. Cela aurait pour effet, assurent les tenants du nudge, de réduire l’obésité. La Nudge Unit, dans son rapport annuel 2010-2011, affirme également avoir réussi à réduire de 13,8% la consommation d’énergie dans les bâtiments administratifs, simplement en changeant les paramètres par défaut de la mise en route du chauffage (par exemple en commençant à chauffer à l’heure d’arrivée des employés, et pas avant).

Tout récemment, la « Nudge unit » a étendu ses activités vers les pays étrangers. Elle a été contractée par le gouvernement des Nouvelles Galles du Sud en Australie.

Le nudge, coincé entre la droite et la gauche

En fait les thèses de Thaler sont un moyen de répondre au dilemme du parti conservateur : d’un côté il prône l’état restreint, qui régule peu, et d’un autre il constate que la liberté totale du marché conduit les consommateurs a effectuer des choix coûteux sur le plan social (et donc économique). En effet, ceux-ci boivent, fument, consomment avec voracité de l’énergie. Le nudge permet de résoudre ce paradoxe : on adopte des mesures peu onéreuses, et qui, parce qu’elles agissent de manière subtile, n’alarment pas les citoyens… Quant aux industriels, ils sont trop heureux d’échapper à des lois ou impôts contraignants en modifiant quelque peu le packaging ou la composition de leur produits, à l’instar d’Heinneken, qui a réduit le taux d’alcool de ses bières pour participer à la lutte contre l’alcoolisme.

Mais la théorie du nudge est aussi très contestée, tant sur ses conséquences éthiques que sur son efficacité réelle. Une attaque violente est venue d’un article du New Scientist que le nudge n’était que « le nouveau nom de la coercition ». Le gros problème affirment-ils que cette méthode donne tout pouvoir aux technocrates, aux experts. Il n’y plus de place pour discuter le bien fondé d’une décision, et rien ne prouve que ces experts soient eux-mêmes tellement plus compétents que les citoyens pour décider ce qui est bon pour eux. En bref, c’est du paternalisme pas si libertaire que cela. Autre son de cloche, le rapport rendu par la Chambre des Lords en 2011, qui affirme le nudge, bien qu’utile n’est pas suffisant pour résoudre de grands problème sociaux comme l’obésité et que les techniques classiques du gouvernement (régulation, taxes, campagnes d’information) restent toujours aussi nécessaires.

Cet été, Cass Sunstein a démissionné de son poste gouvernemental pour redevenir un professeur à Harvard. Aucune raison officielle n’a été donnée pour son départ qui en a soulagé plus d’un dans le monde politique. En effet, nombre des défenseurs de l’environnement l’ont accusé de faire le gros dos face aux multinationales. A droite, l’enthousiasme est encore plus perceptible. Cass Sunstein représente pour les républicains un dangereux gauchiste. N’est-il pas un ardent défenseur des droits des animaux et un opposant à la chasse ?

Au final, la théorie du nudge se retrouve à la fois contestée et adoptée par les conservateurs et les « libéraux » (au sens anglo-saxon du terme). Une preuve sans doute que cet ovni idéologique ne trouve guère sa place sur l’échiquier politique traditionnel. Certains, lors de l’avènement des théories de Thaler et Sunstein, avaient parlé d’une troisième voie, au-dessus des vieilles catégories de droite et gauche. L’avenir nous dira si ce n’était pas plutôt une voie de garage.

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2 commentaires sur “Le Nudge : Comment la théorie du coup de coude a pris un méchant coup de pied

  1. Le Nudge : Comment la théorie du coup de coude a pris un méchant coup de pied
    Le nudge consiste à agir sur les émotions, en créant un biais cognitif qui provoque un comportement émotionnel visant à adopter un comportement spécifique recherché sans contrainte ni coercition : dans le cas de la sécurité, à faire la promotion de la prévention en acquérant des réflexes dirigés par l’émotion beaucoup plus forts que le fait de prendre des décisions appuyées sur le rationnel : «  Rationalité limitée et sécurité  » : http://www.officiel-prevention.com/formation/conseils/detail_dossier_CHSCT.php?rub=89&ssrub=183&dossid=587

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