Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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Street artistes en mode éventail

Publié le 1 mai 2015 par

C’est le printemps, les bourgeons s’éclatent, le muguet est aux portes du bonheur… Le street art autrefois mauvaise herbe devient fleur enviable et recherchée.

imgdebut.jpg Elle envahit et monopolise parcs et jardins culturels de la capitale avec un appétit insatiable, parfois ad nauseam comme le souligne le pochoiriste Ender avec son ange relégué de la sphère paradisiaque aux murs défraîchis de l’Est parisien.
Le printemps c’est le retour de la mode, des tendances, de l’incontournable et de l’éphémère, l’art en est une composante.

Par chance, quelques esprits éclairés, cramponnés aux cimaises de l’histoire de l’art ou tout bonnement de l’Histoire, ne craindront pas l’arrivée de la sécheresse estivale ou des frimas hivernaux :
– Sylvestre Verger avec l’hommage rendu aux muralistes pionniers du mur de Berlin accompagnés d’artistes venus des cinq continents sur le parvis de la gare de l’Est, trait d’union franco-germanique, pour quelques mois (« Art Liberté – Du mur de Berlin au street art », jusqu’au 8 juillet, entrée libre) ;
– Codex Urbanus, à l’autre extrémité du boulevard de Strasbourg, avec l’exposition « Street fans – Le street art s’invite au musée de l’Eventail”. Le 18 semble être le chiffre fétiche d’Urbanus. Il symbolise – selon certains –, la réceptivité, l’intuition, l’imagination, le rêve ! Le 18e arrondissement qu’il parsème de ses personnages mutants post-nucléaires, ménagerie hybride fantastique immatriculée. Le 18e siècle, celui des Lumières, Rousseau, Diderot, Voltaire, et j’en passe, mais aussi Joseph Addison. Qui est-ce icelui ?

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Joseph Addison, écrivain et poète anglais, chantre du bon goût et de l’élégance, professeur de savoir-vivre. Son lien avec Codex Urbanus ? Ce qui précède of course, mais également l’éventail dont Addison enseigne toutes les subtilités dans The Spectator (Le spectateur, ou le Socrate moderne) en 1768 :
«  L’agitation de l’éventail est la dernière partie & le chef-d’œuvre de tout l’exercice ; mais malgré les difficultés, une femme, qui emploie bien son temps, peut s’y rendre habile en trois mois. Je réserve ordinairement cette partie de l’exercice pour la canicule & les jours les plus chauds de l’été, parce que je n’ai pas plutôt prononcé le commandement, agitez vos éventails, que toute la salle se remplit à l’instant de zéphirs, & de petits vents frais, qui sont fort agréables dans cette saison, & qui, dans un autre temps, pourraient être dangereux pour les dames d’une constitution délicate. il y a une variété infinie de mouvements, dont on peut faire usage dans l’agitation de l’éventail; il y a le mouvement fâché, le mouvement modeste, le mouvement craintif, le mouvement confus, le mouvement enjoué, & le mouvement amoureux; en un mot, il n’y a presque pas une passion de l’âme, qui ne produise, dans un éventail, un mouvement analogue ; en sorte, qu’à la seule inspection de l’éventail d’une femme disciplinée, je vous dirai fort bien si elle est de bonne humeur, si elle fait la mine, ou si elle rougit. J’ai vu quelquefois dans un éventail tant de courroux, qu’il eût été dangereux, pour l’amant qui l’avait irrité, de s’approcher de son tourbillon; & dans d’autres moments, je l’ai vu exprimer une langueur si tendre, que j’étais charmé pour la dame, que son amant fût à une distance raisonnable. Il n’est pas nécessaire de dire qu’un éventail prend le caractère de la prude & de la coquette, selon la personne qui le porte.
PS : J’enseigne aussi aux jeunes gens l’art de faire la cour à un éventail.  »

Si les origines de l’éventail remontent à l’Antiquité sous sa forme « plane », il voyage dans les siècles suivants du Japon, à l’Italie, au Portugal puis en France sous sa forme « pliante », inspirée des ailes de chauve-souris. Mesdames, attention à vos coiffures !
C’est en France, en 1760, qu’un dénommé Martin Petit inventa un système de moule à plisser qui en favorisera une diffusion plus conséquente.

Revenons à notre Codex… A l’affut des curiosités de la capitale, il partage ses découvertes à qui veut bien lui confier sa destinée pour une journée ou une soirée… Parmi les lieux remarquables et méconnus, le musée de l’Eventail sis près des grands boulevards parisiens, au centre historique des éventaillistes, parfaitement ignoré sinon de tous, en tout cas du commun des indigènes et des touristes. Aucune devanture sur rue, c’est à l’étage qu’il faudra se rendre pour découvrir le lieu et son animatrice, Anne Hoguet, maître d’art éventailliste, héritière du savoir-faire de ses ancêtres tabletiers, créateurs de montures d’éventail nécessitant des matériaux aussi divers que précieux : bois indigène ou exotique, nacre, écaille de tortues marines, ivoire, corne ou os.

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Le musée de l’Eventail regroupe des merveilles des siècles passés, du XVIIIe et de ses fêtes galantes, à l’art déco et l’impressionnisme… De grands noms parsèment son évolution : Manet, Renoir, Gauguin…
L’art urbain par ses multiples composantes vient y écrire un nouveau chapitre. La volonté de Codex Urbanus a été de brosser un large éventail d’artistes actifs sur la scène parisienne. Il rencontre un enthousiasme quasi unanime. Utilisant les patrons fournis par Anne Hoguet, une des dernières éventaillistes en activité, 16 artistes se sont attelés à la création d’une trentaine d’œuvres dessinées, peintes, bombées ou pochoirisées… un ensemble d’éventails originaux et uniques proposés à la vente.

Nous y croisons, pêle-mêle – suivant des qualifications subjectives –, les wall-graffeurs Astro, Nosbé, Kanos; l’illustrartiste Sollylaisse ; les fiers vandales Codex Urbanus, MG La Bomba ; les street-dessineux Shadee K, Bastek, Bust ; le chineur-encreur Levalet; le scribouillard Tétar, le peintre en l’être Philippe Hérard, l’artiste-galeriste bicéphale Akiza, l’éditeur-multimédia Tarek; le collagiste Nemi et la pochoiriste-ouvrière Adey. Toutes et tous ont admirablement joué le jeu. Leur talent, leur sens de l’adaptation font merveille dans un exercice pour le moins singulier et – en apparence – déroutant. Ils ont réalisé des pièces qui ne génèrent pas que du vent !

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Le musée de l’Eventail, labellisé «  Entreprise du Patrimoine Vivant  » depuis 2006, est à la sortie du métro, au 2 du boulevard de Strasbourg. Prendre le premier escalier, puis à droite escalier B, 3e étage sans ascenseur, porte de gauche, sonnette supérieure ! Pas d’inquiétude, des affichettes assurent le cheminement ! L’hôtesse ouvre la porte de l’écrin de son musée-atelier et vous guide à la découverte de ses perles de culture…

Si le musée de l’Eventail doit être remercié pour le bel accueil réservé au street art, celui-ci apporte en retour son soutien au musée menacé de fermeture par le bailleur mandataire de la mairie de Paris. Une mairie qui sait si bien communiquer et médiatiser son soutien à l’art mais ignore superbement le seul musée du 10e arrondissement et recouvre régulièrement les œuvres urbaines de sa peinture beigeasse « korrigane »!
En ce sens – et quoi qu’il en soit –, le street art demeure un art de résistance !

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