Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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Ecrire des séries télévisées

Publié le 21 avril 2013 par

Des histoires de tripes, de formats et de scénaristes mais aussi de producteurs

ours_230.gif Ecrire une série télévisée de fiction, en France, cher pays de mon enfance… Après une longue période d’existence essentiellement occupée par l’écrit de fictions, romanesques et autres, et des tonnes d’espoirs indéfectibles et bon enfant, j’aurais tendance aujourd’hui à reconnaître la chose impossible. Baisser les bras. Admettre que l’entreprise n’est pas de mon ressort, faite pour d’autres, sans aucun doute, qui ne sont pas abreuvés aux mêmes sources, nourris aux mêmes râteliers et mangeoires.
Qu’est-ce que la série télévisée ?

Une série télévisée peut se présenter selon deux moutures admises. La première déroule une suite d’histoires bouclées sur elles-mêmes dans un contexte donné, mettant en scène des personnages récurrents. Les Enquêtes de Machin ou les Aventures de Machine ( ange gardienne ou pas).  La seconde mouture raconte une longue histoire découpée en chapitres ou épisodes, sur une durée globale narrative appelée saison. Un chapitre ou épisode tourne aux alentours de 30 à 52 minutes, la saison peut se déployer sur 5, 6 ( mini saison ) ou 12, 13, à 22 épisodes. C’est là un formidable format qui permet de raconter de solides histoires, d’y faire évoluer de nombreux personnages grouillant dans tous les azimuts, ce que ne permet pas de maîtriser le cinéma. Les films de 12 heures, à consommer en un seul repas, sont rares… avec indigestion obligatoire au menu, s’ils existaient.

Il va sans dire que cette seconde façon de faire m’est largement préférable aux énigmes infailliblement résolues toutes les 45 minutes par ces ineffables commissaires qui se succèdent sur la scène, affublés pour tenter l’originalité qui d’une féminité énergique, qui d’un fauteuil roulant, qui d’une pipe ou d’une troupe d’acolytes typiques. Restrictions faites, pour lesdites énigmes, quand elles s’inscrivent en arrières plans, quasiment en filigrane, dans la ligne feuilletonnesque de la saison/vision d’ensemble de l’histoire.

Il se peut donc, dans votre vie d’écrivain, que vous tombiez en amour pour une histoire et que vous ayez envie de la raconter par l’écrit et l’image de cette façon, et avec ces outils spécifiques adaptés et convenant pour l’écran. Pour l’écran, et non pas pour la page. Parce que cette histoire est destinée -— et vous le fait savoir à grands cris — à cette dimension dans le cadre de laquelle vous la raconterez, à votre manière, avec votre savoir faire, au mieux de ce qu’elle peut prétendre et espérer. Car c’est bel et bien à l’histoire et à elle seule que vous aurez des comptes à rendre, à elle seule que vous devrez vous soumettre. Pour sa meilleure bonne santé possible.
Alors, cela étant, comment procéder ? A partir de cet instant qui a vu et entendu l’histoire s’en venir cogner à votre porte, comment vivre la chose et répondre à sa sollicitation ? Comment faire pour vous montrer loyal et digne de l’honneur qu’elle vous accorde en vous ayant choisi pour la raconter ? Ha-ha.

S’il suffisait de se mettre à sa table et de ne plus penser qu’à cela, de ne plus se consacrer qu’à cela, de ne plus taper sur son clavier que pour cela… S’il suffisait de ne plus faire qu’écrire, immergé, d’écrire même quand on n’écrit pas, d’être une éponge et de se gonfler de tout ce qu’est l’histoire pour pouvoir la rendre à petites touches effaçant tout ce qui rôde autour de son monde… S’il suffisait. Mais loin de là.
Car si, bien entendu, existe ce passage obligé, essentiel, primordial, de l’empoignade en solitaire avec toutes les soumissions possibles aux services de l’histoire, il y a «  l’ensuite  ». Et la suite du parcours, ordinairement, passe sous les fourches caudines de ce qu’il est convenu de nommer un Producteur. Ou une Productrice. Bref : un organisme appelé Production. La Production aura eu, ou non, auparavant, avec vous, une discussion au sujet de l’histoire, vous aura, ou non, conforté dans ce qu’elle attend, ce qui lui plait, ce qu’elle aimerait. La Production, forte de ses convictions, de ses attentes, de ses certitudes quant à ce que veulent ses clients, sera donc ce qui vous permettra d’écrire la totalité, l’entièreté de l’histoire à construire: la production vous donnera, pour ce faire, des sous. Rémunérera votre travail. La production, chose accomplie, se chargera de vendre ledit travail à une chaîne de télévision qui le lui achètera, donc, et le diffusera.
Voilà à quoi ressemble grossièrement le parcours. La Production (et son représentant Producteur ou Productrice), à la solde – au service ? – d’une ou l’autre Chaîne télévisuelle, et de ses décideurs à la solde, eux, des taux d’écoute des téléspectateurs

Des séries telles que Justified, Homeland, Soprano, Deadwood, Six Feet Under, Dexter, West Wing, Tremé, Fringe, The Shield, The Wire, Sons of arnarchy, Hunted, Californication, Hart of Dixie, Revenge, The Goodwife, Magic City, Boardwalk Empire, Borgen, The Bridge, The killing ne sont pas écrites selon un modèle, mais selon une autopsie des tripes de l’histoire, et chacune à sa manière

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Tout ce beau monde vous faisant comprendre que vous vous êtes fourvoyé en écrivant/racontant une histoire POUR elle-même, qu’il valait mieux écrire POUR ces maillons de l’enchaînement que sont la Production-et-les-décideurs-d’autres-producteurs-à-l’intérieur-des-chaînes-télévisées-et-les-taux d’écoutes-et-les-télespectateurs. Lesquels sont de deux sortes, à ce niveau de la dégringolade : 1) les spectateurs sauvages qui savent encore se nourrir de produits sains au gré de leurs envies gustatives ; 2) les téléspectateurs d’élevage gavés aux pâtées préfabriquées industrielles dont les marques s’étalent régulièrement en couvertures des programmes tv-people. Choisies ( les pâtées ) prônées, décidées, vendues par les décideurs-marchands dont le principal du travail consiste à clamer la connaissance de ce dont ils parlent, où est la qualité et l’intérêt, en regard de la satisfaction régurgitée par des hordes shootées.
Mais écrire pour qui ? A partir de l’instant où nous en avons décidé, dans quels gouffres ténébreux nous précipitons-nous si toutefois nous ne nous sommes pas soumis aux ordres et à la botte de ceux et celles qui nous ont demandé d’écrire non pas une histoire mais l’histoire qu’ils aimeraient lire et sont incapables d’écrire, en pâture aux troupes d’élevage… quels gouffres de noirceurs ? aux aspérités desquels, au fur et à mesure des rebonds de la chute, nous nous écorcherons, nous nous « lambeauriserons », à ces interrogations pointues, acérées et criardes : Qu’est-ce que l’originalité de la création particulière ?
Ecrire une histoire sous forme de série télévisuelle ( mais cela vaut pour les dramatiques solitaires aussi ) aux ordres de quel diktat ? de quel conception très spécifique de la créativité fictionnelle ? et pour qui ?
Encore une fois, il existe bien entendu des légions de faiseurs tranquilles, professionnels de l’écriture télévisuelle, artisans concepteurs d’un produit de consommation destiné au plus grand nombre et au moins gustatif, qui bien sûr, et ne le nions pas, demande aussi une sorte de savoir faire. Et la dépendance est réelle, dans l’écriture, l’addiction soumise à des producteurs-faiseurs-marchands qui ont perdu papilles et odorat, ne savent plus ce qu’est une bonne histoire, confondent simplicité et lisibilité avec mise en compréhension à la portée des moins regardants, oublieux de ce qu’est tout bêtement la belle façon originale de raconter.
Je me suis toujours plu à imaginer ( c’est donc une image ) le scénariste de la série «  Dexter  », ou de «  Six feets under   », pénétrant dans le bureau d’une chaîne française ( cher pays de mon enfance ) et clamant : «  Hola, les gars, alors voilà, j’ai le script d’une série qui met en scène un tueur en série sympa !  » Ou encore : «  Hola les gars, ceci raconte les tribulations d’une famille de croque-morts, et c’est pas du comique…  » Dieu me damne.

Parce qu’évidemment votre parcours de raconteur potentiel n’est pas terminé. Après qu’un producteur de base vous ait contacté pour vous demander de développer un sujet — et c’est à vous que cela s’adresse puisqu’il vous a contacté, vous, pas à un autre… — il peut tout aussi bien vous jeter après lecture de trente pages, qu’il ne saura évidemment pas lire, ou lira de travers. Sous le prétexte que ce n’était pas ce qu’il attendait. Si d’aventure c’est ce qu’il attendait, le parcours continue et vous livrera aux pattes d’un tas d’autres «  auteurs » que d’autres décideurs tiennent sous leurs coudes en réserve et qui sont là pour reprendre le travail dans le sens des multiples envies et manipulations accrochées aux barreaux de l’échelle qui grimpe vers la possible mise en chantier final. Les fameuses équipes de scénaristes. Les commandos de la limpidité et du jonglage avec la fameuse écriture télévisuelle — qui aura, pour exemple, fait le carnage éhonté de la saison 2 de la série Braquo, après que la saison 1 eut été un vrai bonheur chargé de belles promesses…
L’écriture télévisuelle, donc ? La terrible sentence ne se fait jamais prier pour baver sur les lèvres des décideurs, prêchant, à ce propos, pour leur chapelle et son catéchisme de la productive et basique représentation. Sauf que… sauf que des séries telles que Justified, Homeland, Soprano, Deadwood, Six Feet Under, Dexter, West Wing, Tremé, Fringe, The Shield, The Wire, Sons of arnarchy, Hunted, Californication, Hart of Dixie, Revenge, The Goodwife, Magic City, Boardwalk Empire, Borgen, The Bridge, The killing… ne sont pas écrites selon un modèle, mais selon une autopsie des tripes de l’histoire, et chacune à sa manière. Rythme de narration, dialogues riches abondant ou humoristiques ou à la hache, montage des éléments progressifs de compréhension et de découverte… Autant de façons et de manières et d’écritures propres à la spécificité des récits et de leur univers.

Ecrire une série télévisée…
On se dit que le rêve… et si cela passait tout simplement par une histoire, un auteur, un semeur-cultivateur qui aimerait cette histoire, sur un sujet entendu, qu’il aurait demandé à l’auteur d’écrire, et qui permettrait sa culture, et son existence à l’écran, là où elle serait dans ses terres.
Tout simplement. Tout simplement deux mots qui, tout simplement, ne sont pas, j’en ai peur, à leur place, ici.

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