Influences (n. fem. pluriel)
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#Bookpal #KIM Hyung-seok

Kim Hyung-seok révolutionne le management coréen

Publié le 17 septembre 2015 par

Depuis 2008, la crise sans fin qui touche la Corée du Sud a fait émerger une nouvelle race de managers aux pratiques novatrices. Bookpal, une simple appli pour téléphone portable et tablette, est en train de révolutionner le marché de l’édition en Corée du Sud. Son dirigeant, véritable iconoclaste, KIM Hyung-seok, bouscule aussi l’approche confucéenne traditionnelle de l’entreprise et du management.

KIM Hyun-seok, dirigeant de Bookpal
KIM Hyun-seok, dirigeant de Bookpal
La crise de 2008 a laissé la Corée du Sud dans une ornière dont elle n’arrive pas à sortir. La croissance est faible, l’économie sombre en plein marasme. Tandis que les ménages et les entreprises s’endettent, le chômage chez les jeunes diplômés ne cesse d’augmenter, alors que le niveau de vie des plus de soixante ans est trop faible pour leur permettre de prendre leur retraite.

Si le gouvernement a investi largement dans le secteur des énergies vertes, ses efforts, qui ont boosté le secteur avec des objectifs ambitieux, n’ont pas encore eu l’effet escompté sur l’ensemble de l’économie. Les diplômés sans travail n’hésitent donc pas à profiter du levier internet pour se lancer dans la libre entreprise, c’est le cas de KIM Hyung-seok, le dirigeant de Bookpal.

Bookpal : un nouveau concept

Bookpal est un service d’édition payant sur tablette et smartphone. Spécialisé dans le roman de gare, publié sous forme de feuilleton, une vraie littérature populaire, la société connait succès sur succès avec plus de 3 millions de téléchargements de l’application et des auteurs stars ayant accumulé pour certains jusqu’à 100 000 USD de revenus. L’équipe, composée de soixante personnes, cent fin 2015, gère un catalogue de 3000 auteurs permettant la publication de 500 nouveaux épisodes par semaine. Les romans, vendus sous forme de feuilletons, sont le format parfait pour une lecture rapide dans les transports en commun et le public est prêt à payer pour avoir la primeur des nouveaux épisodes.

Pourtant rien ne prédestinait KIM Hyung-seok à devenir dirigeant d’une start-up. Il est diplômé en ingénierie électronique d’une des meilleures universités de Corée, Sogang University, fondée par des Jésuites dans les années soixante, dont est aussi issue la Présidente actuelle. Son destin était de finir simple cadre chez Hyundai, qu’il intègre au début de sa carrière. Mais très vite, il se trouve à l’étroit pour un poste non taillé pour lui. Il démissionne et rejoint une agence de publicité. Après 10 ans, il arrive au bout de ce qu’il souhaitait. Il jette l’éponge et crée Bookpal en 2011 avec un de ses amis. La société se cherche, teste différents business modèles et en 2013 trouve le sésame gagnant avec la rémunération de feuilletons publiés chaque semaine. C’est un véritable plébiscite par le public. Les auteurs plutôt frileux au départ rejoignent par la suite en nombre la société. Devant ce succès, de nouveaux projets émergent et les investisseurs n’hésitent pas à financer le développement de la société.

Des réseaux traditionnels aux réseaux sociaux

En Corée, un homme d’affaires doit toujours veiller à entretenir un réseau mais Hyung-seok n’est pas issu du secteur de l’édition. «  J’aurais pu construire un réseau en buvant de l’alcool ou en jouant au golf, mais je préfère largement écrire sur Facebook. Mes publications sur Facebook sont un moyen de gagner en visibilité et de créer ainsi des événements  ». C’est lors de la première année de son cursus universitaire que Hyung-seok prend goût à l’écriture. En plus des matières classiques, les étudiants doivent lire deux livres tous les dix jours et en faire un compte rendu. Le démon de l’écriture ne le quittera plus.

Lorsque qu’il travaille en agence de publicité, le soir il se transforme en éditorialiste pour un site web politique de centre gauche, et depuis écrit. Parfois au grand dam de son service de relations publiques car les enjeux sont maintenant financiers, il publie de nombreux textes : ses voyages en Chine, les spécificités du marché de l’édition, la naissance de Bookpal, ses réflexions sur l’actualité, etc. Tout y passe. Il ne veut pas que ses services relisent ses écrits, car pense-t-il, la sincérité est le cœur de la communication sur Facebook. «  Si on n’est pas sincère avec un discours trop corporate, le public n’adhère pas. Facebook ne m’a jamais desservi  », précise-t-il. L’entreprise est jeune, le marché non mature et il s’adresse à une nouvelle génération férue d’internet et bien loin de la culture classique d’homme d’affaires. Pour avoir le temps d’écrire, il se déplace en transports communs. Avec trois heures de trajet quotidien, cela lui laisse le temps de réfléchir et d’écrire. Mais le travers de ce mode de déplacement c’est que maintenant les gens le reconnaissent ; parfois dans des lieux inattendus comme les toilettes. Hyung-seok souligne malicieusement que «  le revers de la notoriété, c’est de ne plus avoir droit à l’erreur  ».

Avec un tel dirigeant, le management de l’entreprise s’en trouve forcément impacté. Pour lui, l’erreur est de croire que l’entreprise est une chose établie alors qu’elle est toujours en extension. Il faut toujours innover dans son organisation sans jamais copier ce qui est fait ailleurs. Ainsi il tâtonne, il réfléchit et essaye.

L’héritage confucéen ?

Au départ, il voulait rejeter l’héritage confucéen mais il est arrivé très vite à la limite de ce principe. Comme il le souligne : «  Il ne faut jamais nier l’héritage socioculturel. Au début je voulais créer une société avec des salariés plus autonomes. Mais quand je déléguais, les salariés n’y arrivaient pas. Ils ne savaient pas comment faire car depuis l’enfance ont leur a appris un seul modèle lié au respect de l’autorité. Il faut accepter son héritage même si cela n’est pas efficace. C’est une question d’équilibre. Il faut décider au cas par cas sachant que je dois aussi évoluer en tant que chef d’entreprise.  »

Pour casser la logique hiérarchique et le système des titres honorifiques, chaque salarié reçoit un pseudonyme. La règle est simple : une consonne couplée à une voyelle qui se répète (voir photo ci-contre). L’idée a émergé un jour où les salariés pour blaguer l’ont surnommé Toutou. En en appelant à l’égalité, il a décidé que chaque salarié serait dorénavant appelé par un pseudonyme. Du jour au lendemain, les bureaux se sont constellés de panneau pour indiquer les pseudos de chacun et ainsi faire fi des titres honorifiques, des dénominations liées à l’âge comme grand frère, petite sœur omniprésents dans la langue coréenne.

Un pseudo pour casser la logique hiérarchique
Un pseudo pour casser la logique hiérarchique

Toujours pour essayer de s’affranchir d’une logique pyramidale où le chef est omniscient et omnipotent, l’organisation non hiérarchisée est en pôle projet. Cinq directeurs de service dont lui anime une équipe où chacun travaille par projet sans notion de hiérarchie. Pour aller plus loin, il a délégué le recrutement, qui se fait maintenant par cooptation. S’il y a création de postes, c’est le salarié avec qui la recrue va travailler qui a en charge de trouver son futur collègue de travail. La responsabilité ensuite est portée par celui qui a recruté. S’il s’est trompé, cela impacte son évolution de carrière.

Temps de travail en Corée

Travailler tard est une constante en Corée du Sud, Bookpal n’y échappe pas. Hyung-seok détestait voir les gens avaler un morceau sur un coin de bureau pour le déjeuner. Il les a donc tous envoyés à l’extérieur même si cela prenait plus de temps. Mais les salariés s’y sont opposés ; en effet déjeuner vite fait est un moyen d’économiser du temps et de rentrer plus tôt à la maison le soir. Pour lui cet exemple est symptomatique : «  Il faut trouver un équilibre. Si je suis incapable, car l’entreprise est trop petite, de créer un restaurant interne avec un chef cuisinier, autrement dit si je suis incapable de proposer une solution, il ne faut ni juger, ni critiquer leur attitude. « 

Bookpal est un exemple parmi tant d’autres. De nombreuses sociétés, solides, font des expériences managériales. Souvent d’une taille moyenne et présentes sur un marché spécifique, elles n’ont pas besoin de se développer fortement. Ces dirigeants ont souvent des idées innovantes et investissent sur leurs salariés : construction d’une piscine, d’un hammam ou la possibilité de prendre autant de vacances que l’on souhaite, etc… Jennifer Soft est devenu ainsi un cas d’école, tous les bénéfices dégagés par la société sont réinvestis dans le bien être des employés.

Et si les PME servent de laboratoire à de nouvelles approches, des gros acteurs commencent à repenser leur organisation et la gestion de leurs ressources humaines. Des pratiques managériales à l’opposé d’une image stéréotypée de l’entreprise coréenne.

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