Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

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#Albin Michel #Ce qu’on peut lire dans l'air #Dinaw Mengestu #Les belles choses que porte le ciel

Dinaw Mengestu on air

Publié le 23 septembre 2011 par

Assez de tergiversations: « Ce que l’on peut lire dans l’air » est une vraie réussite. Et pas seulement parce que le rêve américain y est écorné avec une savoureuse ironie.

mengestu.jpg Il n’y aurait, à en croire les spécialistes de la chose, rien de plus traître, de plus dangereux, en un mot, de plus casse-gueule qu’un deuxième roman. Au premier, on pardonne ses erreurs. On s’émerveille devant ses maladresses, on loue son charme balbutiant. Mais le suivant, c’est ainsi : on l’attend au tournant.
Prix du meilleur premier roman étranger en 2007 pour Les Belles Choses que porte le ciel, listé une poignée d’années plus tard parmi les vingt auteurs de moins de quarante ans les plus prometteurs par le New Yorker, salué par la critique et le public de ce côté-ci comme de l’autre de l’Atlantique, Dinaw Mengestu, à l’évidence téméraire, revient cette saison avec un deuxième roman, au titre –Ce qu’on peut lire dans l’air– délicieux, bien qu’assez peu fidèle à la VO (How to read the air).

Assez de tergiversations, ce livre, comme le précédent, est une vraie réussite. Et pas seulement parce que le rêve américain y est écorné avec une savoureuse ironie : «  Le premier truc pour devenir américain (…), c’est de te comporter comme si tu savais tout. Les deux mots les plus importants dans la langue anglaise, c’est «  bien sûr  ».  ». Ce qu’on peut lire dans l’air est un mélange heureux et paradoxal de profondeur et de légèreté, où il est question, à des lieues des habituels clichés, de déracinement –familial autant qu’ethnique-, d’exil, de solitude, d’intégration et du redoutable pouvoir de la fiction.

Mariam, au début des années 1980, quitte l’Ethiopie pour rejoindre Yosef, son mari, qui a rallié les Etats-Unis trois ans plus tôt, alors que la révolution secouait son pays. S’il y eut de l’amour entre ces deux-là, le temps et la distance en aura eu raison… C’est leur histoire, et la sienne dans le même mouvement, que Jonas, leur fils, tente de s’approprier une trentaine d’années plus tard, alors que son propre mariage s’effiloche et que sa vie part à vau-l’eau.
A la mort de son père, Jonas Woldemariam, donc, professeur à mi-temps dans un lycée huppé, s’efforce de reconstituer le voyage de noces de ses parents, effectué à bord d’une vieille Monte Carlo, le long de quelques fleurons de la mémoire américaine, comme s’il était nécessaire, après s’être coupé de ses racines, de s’en fabriquer de nouvelles.
Mais il y a des trous dans l’histoire, le passé ne s’offre pas d’un bloc, et ce que Jonas ignore, il l’invente, le romance et le livre en pâture à ses élèves, prêts à tout entendre… pourvu que ce soit caricatural, outré, bref, exceptionnel, et que le récit de leur professeur, surtout, rencontre leurs propres fantasmes.

On est vite convaincu que ce qui flotte dans l’air et se distille lentement, au fil des chapitres, n’est rien d’autre qu’une forme d’apaisement mélancolique.

L’écriture de Dinaw Mengestu est lumineuse et étrangement douce, pour tempérer les violences du quotidien ou, au contraire, les mettre en exergue, on ne sait trop. Mais l’on est vite convaincu que ce qui flotte dans l’air et se distille lentement, au fil des chapitres, n’est rien d’autre qu’une forme d’apaisement mélancolique.
Si l’on y tient absolument, rattrapés par la mode de l’autofiction (genre qui, rappelons-le au passage, n’en est pas un), on recherchera les passerelles entre Dinaw Mengestu, né en 1978 à Addis Abbeba, débarqué à l’âge de deux ans aux Etats-Unis après avoir fui l’Ethiopie avec ses parents, qui se partage désormais entre la France et l’Amérique, et Jonas, son narrateur ; comme on guettera les traits d’union entre leurs histoires, leurs parcours. Mais ce n’est pas une obligation, ni même recommandé : le propre des excellents deuxièmes romans, c’est qu’ils se suffisent à eux-mêmes.

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