Yes, we scan !
Publié le 16 octobre 2011 par Les Influences
Pourquoi écrire un livre quand on peut piller ? De Joseph Macé-Scaron à Jean d’Ormesson, en passant par une nouvelle collection chez Plon, la tendance de la rentrée.
C’est la tendance lourde en ce moment dans l’édition : les livres qu’on n’a pas écrits, mais que l’on publie tout de même sous son nom. On ne parle pas ici d’intertextualité, ce concept 70’s récemment remis en vogue par Joseph Macé-Scaron, mais bien de piratage, de caviardage, de manipulation des sources, voire de détournements. Par exemple, « La Conversation » que Jean d’Ormesson vient de publier, et où il fait discuter un Bonaparte en passe de trahir la République pour devenir Napoléon, avec Cambacérès, le deuxième consul. Faussement modeste, l’académicien prétend qu’il n’a pas osé se mettre à la place du futur Empereur et que les phrases que celui-ci prononce figurent dans des documents de l’époque : « récits, rapports, Mémoires »… Résultat : patchwork, broderie, travaux d’aiguilles, théâtre scanné… En revanche, faible avec les forts, fort avec les faibles, Jean d’O n’a pas hésité à se glisser dans la peau du futur duc de Parme et d’imaginer ses répliques : d’où, peut-être, que celui-ci a l’air d’une véritable carpette.
La vraie-fausse interview de Noëlle Chatelet
Le genre devient même collection chez Plon. Dans le premier volume, l’éditeur Marc Lecarpentier explique : « L’entretien que vous allez lire n’a jamais eu lieu ». Non, aussi incroyable que cela puisse paraître, c’est le mot, Noëlle Chatelet, la sœur de Lionel Jospin, n’a jamais interviewé le Marquis de Sade. « Et pourtant », continue l’éditeur, « rien n’est inventé ! Le marquis de Sade est bien l’auteur de toutes les réponses qu’il a faites à Noëlle Chatelet, puisque cette vraie-fausse interview a été écrite…. à partir de ses livres ». Bref, c’est un peu comme la vraie-fausse interview de Fidel Castro par PPDA où le présentateur avait inventé ses questions après-coup. Il est vrai que PPDA n’écrit pas toujours ses livres non plus.
Cela donne des choses réjouissantes :
Marquis de Sade. — Je suis un libertin, pas un criminel ni un meurtrier.
Noëlle Chatelet. — Voilà peut-être ce que je voulais vous entendre dire ! Bien sûr que vous n’êtes pas un meurtrier ! Mais rien n’y fera : on risque la confusion entre l’homme que vous êtes et l’extrémité de votre œuvre !
Marquis de Sade. —
On attend maintenant, dans la même collection, le dialogue entre Mazarine Pingeot et René Descartes. Celui dont la devise était « Heureux celui qui vit caché » aura certainement doute plein de choses à dire à la fille du Président.
Un commentaire sur “Yes, we scan !”
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.
Yes, we scan !
De l’intertexualité (qui est sincère car, je vous le rappelle, elle nie qu’il y ait des « auteurs ») à l’internettualité (qui est insincère car elle fabrique des auteurs »). Relire Marx sur ce qu’est une marchandise.