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François Hollande, socialiste ?

Publié le 15 mai 2012 par

De quel socialisme est issu le nouveau Président de la république ? Eléments de réponses du philosophe des idées Pierre Musso et des historiens Christophe Prochasson et Gilles Candar

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©Olivier Roller
©Olivier Roller

Un imaginaire politique rationnel et réaliste

par Pierre Musso*

« L’imaginaire politique de François Hollande est centré sur une double référence: d’une part, les valeurs républicaines, issues de l’analyse de Jean Jaurès sur la République sociale, avec en son centre le respect de l’Etat de droit, les notions de laicité, d’égalité, de justice et de service public et d’autre part, l’héritage social-démocrate lui-même composé de deux influences : d’un coté, le «  delorisme  » et la référence au modèle suédois, sorte de new-dealisme européen, et d’un autre côté, la référence au mitterandisme et à une certaine pratique de l’union de la gauche.

Le hollandisme est donc un syncrétisme complexe entre les valeurs républicaines et une vision sociale-démocrate post-1989, marquée par la pratique delorienne en Europe. Ce qui lui permet de synthétiser une vision rationnelle et laïque de l’Etat-nation et de l’Europe. En revanche, sa vision du monde (au-delà des frontières européennes) semble moins bien définie : par exemple sa vision des Etats-Unis ou de la Chine et de leurs relations.

Sa référence/révérence omniprésente à Mitterrand est à la fois symbolique (le premier président de gauche sous la 5è République) et politique. En effet, tous deux ont su réunir toute la gauche pour conquérir le pouvoir, mais à la différence de Mitterrand, François Hollande n’a pas pratiqué l’adage de Guy Mollet selon lequel la conquête du pouvoir se fait à gauche et son exercice à droite. A la fois pour éviter les désillusions du tournant de 1983 et par référence au modèle de la social-démocratie suédoise qui pratique un shadow cabinet responsable quand elle est dans l’opposition.
La référence à Mitterrand lui permet aussi d’assurer la « continuité » symbolique de l’histoire du socialisme français à travers ses grandes figures (Jaurès, Blum, MItterrand, Hollande), comme Mitterrand le fit avec Léon Blum. Enfin, sa référence à Mitterrand est aussi un hommage et un emprunt au style de son guide en politique dont l’habileté florentine est reprise par Hollande sur un autre mode, par la combinaison des silences et des bons mots qui maintiennent le mystère sur ses intentions et ses décisions.

En résumé, l’imaginaire hollandien mêle la philosophie de l’Etat républicain français fixée aux débuts de la Troisième République, et sa pratique dans la haute fonction publique française qui l’a formée, avec la pratique politique sociale-démocrate du couple Mitterrand-Delors en France et en Europe dans les années 1980-90. C’est un imaginaire « réaliste » et rationnel, de type politico-étatique, ouvert au compromis, à la négociation, à l’argumentation rationnelle dans l’espace public défendue par Jurgen Habermas, et sensible aux rapports des forces.On peut dire que cet imaginaire réactive à sa façon celui des Lumières, de la République sociale laïque, de la social-démocratie européenne et des pères fondateurs de l’Union européenne.C’est pourquoi le hollandisme peut se présenter comme « normal » dans un pays comme la France, car il réactive les valeurs fondatrices de son droit et de ses « normes » juridiques. Bref, le hollandisme est « normal » en relégitimant ces normes auxquelles il se réfère. »

* Philosophe, professeur à l’Université Rennes 2 et Télécom Paris Tech A co-dirigé avec Juliette Grange « Les socialismes » (Editions Le Bord de l’eau/Colloque de Cerisy, avril 2012).

Pierre Musso (D.R)
Pierre Musso (D.R)

Le hollandisme est l’héritier le plus direct du rocardisme

Par Christophe Prochasson *

«  Je pense que François Hollande ne procède idéologiquement d’aucune des grandes traditions de la gauche française ou, plutôt, qu’il y puisera à sa guise selon le mouvement qui marquera son action. Car son socialisme est d’abord un pragmatisme social qui ne s’embarrasse pas de théorie ni d’héritage. Fondé sur les principes de la justice, il s’élaborera au fil de son action. C’est un socialisme présentiste.

De ce point de vue théorique, sa présidence peut marquer un tournant. Coupé des grands mythes historiques sur lesquels s’est longtemps définie la gauche et que Mélenchon a remis sous perfusion, le socialisme peut être tout aussi transformateur, et peut-être même davantage, que l’ancienne métaphysique. Il aura à renégocier le pacte social entre la gauche, le peuple et l’Etat, à redéfinir le rapport à la nation et à redessiner les contours de la notion de progrès. Mais en marchant, car pour la théorie, c’est trop tard ! Historiens et philosophes le mettront ultérieurement en forme. A condition de ne pas l’enfermer dans la catégorie, Hollande est sans doute l’héritier le plus direct du rocardisme en ce qu’il croit tout autant à la société qu’à l’Etat. »

*Historien des idées et directeur d’études à l’EHESS. Dernier ouvrage : « La gauche est-elle morale ? », Flammarion, 2010.

Christophe Prochasson (ehess.fr)
Christophe Prochasson (ehess.fr)

Un socialisme qui se construit par la conquête des terroirs

Par Gilles Candar*

« Il ne me semble pas que François Hollande se soit construit par une grande réflexion historique, il me semble qu’il est plutôt un fédérateur, un observateur, qu’il aime en effet comme il l’a dit rencontrer, voir des gens, écouter…. C’est une grande qualité, reconnue, mais parfois oubliée, qu’avait Jaurès…

Il est assez classiquement à la charnière des deux gauches (comme Martine Aubry, mais finalement beaucoup de leaders récents, même Jospin), tenant de la 2e gauche une attention privilégiée aux questions économiques et sociales, avec la volonté de ne pas trop contraindre la société, mais de laisser les acteurs sociaux débattre, combattre et nouer des compromis, et un sens de l’Etat (sa formation, ENA, Cour des comptes, conseiller à l’Elysée…) et de ses moyens qui le rattachent plus au radicalisme modernisateur de Mendès France qu’à Rocard ou ses amis. D’ailleurs il est héritier, via Témoins et les transcourants, de Jacques Delors, donc d’un homme et d’une sensibilité qui avaient choisi Mitterrand contre Rocard, qui peuvent parfois penser gérer avec des positions proches de celles de certains centristes réformateurs, mais qui politiquement font le choix de se situer dans une gauche structurée. Il est significatif que Delors, quoi qu’on en ait dit, n’ait jamais tenté d’aventure transgressive ou de triangulation, il a pu être avec la majorité la plus UDR (Chaban) ou avec le PS du Programme Commun (Mitterrand), mais pas entre les deux.

Et Hollande a continué, bien fidèle au précepte de Mitterrand : d’abord rassembler son camp, puis après s’ouvrir éventuellement… De Mitterrand il a aussi l’attachement aux élus, aux territoires, une tradition d’une part du socialisme français. L’élu est à l’intersection du socialisme et du suffrage universel disait Jaurès. C’est une tradition forte : le mandat de Jaurès au sein du socialisme français est d’abord et surtout celui de député du Tarn, plus qu’un magistère intellectuel, surtout pas un poste dans le parti, et cette tradition d’un socialisme qui se construit par la conquête des terroirs est assez spécifiquement française.
Jaurès l’incarne au mieux, Blum la continue (il constitue son ministère en faisant appel surtout à des maires pour les SFIO) et Mitterrand, et Hollande certes longtemps 1er secrétaire choisit de trouver sa légitimité par son ancrage en Corrèze et sa conquête reconnue et pérenne du Conseil général. C’est peut-être là où il innovera le plus par rapport à Jospin dont il est idéologiquement proche : un souci particulier du territoire et de la fracture territoriale qui ne contredit pas mais représente en quelque sorte la forme actuelle la plus aboutie de la fracture sociale. »

* Historien, Président de la Société d’études jaurésiennes. Derniers ouvrages : La gauche et le pouvoir. Juin 1906: le débat Jaurès / Clemenceau, avec Manuel Valls, préface de Gilles Finchelstein, Essais de la Fondation Jean-Jaurès, 2010. Jaurès, du Tarn à l’Internationale, avec Jean-Numa Ducange, Vincent Duclert, Marion Fontaine et Emmanuel Jousse, Essais de la Fondation Jean-Jaurès, 2011. Jaurès et l’Extrême-Orient. La patrie, les colonies, l’Internationale, Essais de la Fondation Jean-Jaurès, 2011

Gilles Candar (La Découverte.com)
Gilles Candar (La Découverte.com)

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4 commentaires sur “François Hollande, socialiste ?

  1. François Hollande, socialiste ?
    M Hollande sera un président calme, posé, reflet d’une France apaisante. Le Président présidera et le gouvernement gouvernera ce qui sera nouveau. Il saura affirmer le rôle de la France qui actuellement perd sa grandeur depuis 2007.

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