Influences (n. fem. pluriel)
  1. Fluide provenant des astres et agissant sur la destinée humaine.
  2. Action exercée sur quelqu’un.
  3. Action exercée sur quelque chose.

Les Influences

Filtré pour vous : L'actualité politique et intellectuelle

##HistoireDeL'Art #Politique #Religion

Histoire de l’Art : Muhammad et l’«offusquée» offusquante

Publié le 30 janvier 2023 par

L’Info : «Offusquée» par la révélation scientifique d’une image de Muhammad, lors d’un cours d’histoire de l’art, Aram Wedatalla, une étudiante de l’université de Hemline, a poussé au renvoi de l’enseignante Erika López Prater. Motif: son enseignement qualifié d’« irrespectueux et islamophobe ». Comment enseigner le visible quand celle qui voit n’y croit pas ?


Dans un communiqué de presse en date du 30 janvier, l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) « apporte son soutien à Erika López Prater, enseignante d’histoire de l’art à l’université Hamline (Minnesota), renvoyée pour avoir inclus dans son cours une image représentant le prophète Muhammad». L’institution, dirigée par Éric de Chassey, rejoint le concert d’un certain nombre d’organisations internationales et américaines de la discipline. L’Inha, comme ses homologues, «proteste contre une décision infondée, qui constitue un déni des faits scientifiques et met en danger les fondements de la liberté de la recherche et de l’enseignement en histoire de l’art».

La professeure avait pourtant pris toutes ses précautions, lors de ce cours, prévenant ses élèves musulmans que des images pouvaient les contrarier, et qu’ils pouvaient s’absenter. Une étudiante de tradition wahhabiste semble-t-il, Aram Wedatalla, est restée et a estimé, notamment dans les pages du journal universitaire, The Oracle, que le cours était affreusement pêché : «En tant que musulmane et personne noire, je n’ai pas l’impression d’avoir ma place, et je ne crois pas que je la trouverai un jour dans cette communauté si ses membres ne m’estiment pas, et s’ils ne font pas preuve à mon égard du même respect que je leur porte. »

L’étudiante en histoire de l’art Aram Wedatalla. Un avis catégorique sur la représentation religieuse musulmane, mais aussi sur le contrôle de sa propre image semble-t-il. Tweeter.

Objet du scandale : une image de Muhammad recevant les révélations coraniques de l’ange Gabriel. La traçabilité de cette représentation est incontestable. Elle figure au sein d’une copie de l’Histoire universelle (Jâmi’ al-Tawârikh) du vizir Rashîd al-Dîn, et a été réalisée dans les ateliers de Tabriz, Iran, au début du XIVe siècle. Le manuscrit, lui, est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre des arts du livre dans le monde islamique. Il est abondamment illustré de peintures qui témoignent de la richesse artistique des ateliers princiers durant la période médiévale. C’est une œuvre à la valeur inestimable pour l’histoire et pour le patrimoine artistique mondial, souligne-t-on à l’Inha. C’est pourquoi le manuscrit et l’ensemble des peintures qu’il renferme, dont celles qui ont trait à la vie du prophète Muhammad, ont été maintes fois étudiées, exposées et publiées, aussi bien au sein d’ouvrages destinés à des spécialistes que dans des contextes visant de plus larges publics, comme les universités ou les musées. Mais l’étudiante, et aussi militante islamiste au sein de l’association des étudiantes et étudiants de confession musulmane, a fait pression, porté plainte et, dans la foulée, une direction, soudainement iconoclaste, a préféré suspendre Erika López Prater dont l’enseignement a été jugé « irrespectueux et islamophobe », et décidé de ne pas la reconduire. « Le respect pour les étudiants observant la foi musulmane dans cette classe aurait dû supplanter la liberté de l’enseignement », a chargé encore plus la présidente Fayneese Miller, dans un courriel lu par New York Times. Il semblerait que depuis le 13 janvier, la présidence de cette petite université (méthodiste), accueillant 1 800 étudiants, s’emploie désormais à rétropédaler, arguant que l’accusation d’islamophobie a été un brin exagérée. L’indignation nationale et internationale devant la décision expéditive et anti-scientifique de Fayneese Miller n’y est peut être pas pour rien.

Fayneese Miller, présidente de l’Université de Hemline. Courage, déscientifisons nos programmes. DR

Assez prudent d’ordinaire sur ce genre d’histoire, quand il ne sur-cancelle pas par prévention, le monde de l’histoire de l’art cette fois se rebiffe. « Nous réaffirmons comme un principe intangible la liberté des enseignantes et enseignants d’histoire de l’art, quel que soit le pays où ils exercent, de montrer à leurs étudiants et étudiants toute image, à condition que celle-ci ait sa nécessité dans un propos argumenté, souligne l’Inha. Il nous paraît particulièrement important de souligner que cette décision manifeste une méconnaissance profonde de l’histoire de la culture islamique, qui n’a pas toujours et partout interdit la représentation humaine, contrairement aux affirmations des islamistes extrémistes aussi bien que des ignorants hostiles. C’est un parti pris démagogique qui ne peut être passé sous silence car il ouvre la voie aux positions les plus extrémistes, à l’heure où il est primordial de soutenir le discours scientifique qui met en lumière la richesse de cette civilisation et sa complexité». Sur Change.org, la pétition de soutien à l’enseignante, lancée le 24 décembre dernier, a recueilli à ce jour, près de 19 000 signatures.

Lire aussi le point de vue de l’historien de l’art Bruno Nassim Aboudrar.


Je m'abonne ! Partage Twitter Partage Facebook Imprimer

Laisser un commentaire

Ce site web utilise ses propres cookies et ceux de tiers pour son bon fonctionnement et à des fins d analyse. En cliquant sur le bouton Accepter, vous acceptez l utilisation de ces technologies et le traitement de vos données à ces fins. Vous pouvez consulter notre politique en matière de cookies.   
Privacidad