Des archéologues exhument une oeuvre d’art contemporain
Publié le 29 mai 2010 par Rédaction LI
A partir du 31 mai, les chercheurs de l’INRAP vont fouiller une oeuvre d’art contemporain, Le Déjeuner sous l’herbe, enterrée en 1983 à Jouy-en-Josas. Que va t-il rester de cette performance de l’artiste Daniel Spoerri ? Simples détritus ou témoignage culturel ?
La manifestation du 23 avril 1983 s’était déroulée aux abords, fait du hasard, de la future Fondation Cartier. L’artiste avait invité le gratin de l’art contemporain à venir faire un banquet, « un repas de tripailles » tandis qu’un bulldozer à côté des agapes s’affairait à creuser une tranchée longue de 60 mètres. Daniel Spoerri siffla la fin du banquet, et les 120 invités jettèrent dans l’excavation tables, nappes, vaisselle, reliefs de repas mais aussi objets divers et d’art, photos, documents de toutes sortes. Le tout disparu sous des mètres cube de terre, au cours d’un rituel imaginé par l’artiste en chef. L’oubli fit le reste.
D. Spoerri (1930), plasticien, performer est aussi l’un des cofondateurs du nouveau réalisme aux côtés d’Yves Klein et de Jean Tinguely. Il a réfléchi lui aussi, tels Arman, Cesar, Niki de Saint-Phalle ou Anne Messager, sur les accumulations, les détritus, le recyclage à travers ce qu’il appelle ses « tableaux-pièges » (par exemple, des objets disposés, mis en scène et collés sur une toile) dont Le déjeuner sous l’herbe est l’oeuvre ultime… et décomposé depuis vingt-sept ans.
Archéologie des détritus
Dans cette performance, on n’arrive pas à démêler qui impulse l’oeuvre : Daniel Spoerri, l’anthropologue Bernard Müller à l’initiative de ce déterrement ou encore Jean-Paul Demoule, directeur de l’INRAP qui, mobilisant ses bataillons d’ experts, se livre à la première performance d’archéologie préventive ? Les analyses scientifiques diront s’il faut prendre au sérieux un entassement de gobelets et de couverts en plastique.
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